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Article paru dans le numéro 103 (décembre 2000) de LMDP

© LMDP Copie autorisée pour usage pédagogique non lucratif et avec mention de la source

La société de consommation: approche sociologique

Récit d’un parcours réalisé par Christian Munster * Troisième degré, IND, Saint-Hubert (Belgique)

Voici un parcours qui allie la réflexion philosophique, la dimension sociologique et le plaisir de découvrir une œuvre romanesque.

Plus qu’une analyse détaillée, le parcours cite une série de pistes très différentes que le professeur peut suivre à loisir, en fonction du temps imparti à cette séquence et en fonction de l’intérêt des élèves.

Corpus:

Un extrait de Karl Marx, Le Capital, 1867.

Un extrait de Herbert Marcuse, L’Homme unidimensionnel, 1964. 

Jean Baudrillard, Le Système des objets, Collection Bibliothèque médiations, Denoël Gauthier, 1968.

Georges Perec: Les Choses, coll. J’ai lu, n° 259, 1965.

Annexes: Marx et Marcuse (extraits); incipit du roman Les Choses

Point de départ.

Nul ne peut nier qu’il vit aujourd’hui dans une société entièrement portée vers la consommation de biens. La vague des GSM qui submerge tous les acteurs de la société moderne n’est qu’un exemple parmi d’autres de biens que l’on tente de qualifier d’essentiels alors que des générations entières ont su vivre sans lui. Déjà, aujourd’hui il acquiert un statut de mythe.

Engager un parcours sur cette société est donc utile pour comprendre un peu le mécanisme qui contrôle et régit nos pulsions consommatrices.

Descriptif du parcours.

1° INTRODUCTION (Marx et Marcuse)

Nous partons d’une prise de conscience (notamment par le jeu de la publicité) que nous vivons dans une société de consommation. Ensuite on engage une réflexion sur le caractère essentiel et secondaire de tous les objets présents sur le marché. On distinguera ainsi les besoins vitaux et les besoins superflus.

Grâce au commentaire du texte de Marx, nous montrons que le phénomène n’est pas nouveau (puisque datant du milieu du 19e siècle). A partir de cette analyse, on peut montrer que Marcuse, dans les années 60, dénonçait également notre société de production et de consommation. Pour lui, ce besoin irrépressible de produire ne peut entraîner qu’une frustration.

 

2° ANALYSE DU «SYSTEME DES OBJETS» DE BAUDRILLARD.

La lecture globale du livre peut paraître fastidieuse pour les élèves, aussi je conseille d’en faire une synthèse et d’accorder plus d’importance à la première partie: «Le système fonctionnel ou le discours objectif».

On pourra également coupler cette analyse à l’étude de «Mythologies» de Roland Barthes, 1957. (Collection Points, Editions du Seuil, n°10)

Le point de départ est de démontrer que ce qui nous semble «naturel» ne l’est pas nécessairement mais est historique. Dans «ce-qui-va-de-soi», se cache une idéologie. C’est ce qu’a essayé de démontrer Roland Barthes dans son livre.

Dans l’introduction, Baudrillard signale que tout objet est divisé en deux aspects: l’essentiel et l’inessentiel.

L’essentiel est le rôle de cet objet, l’inessentiel est la forme, la couleur, le design. Aujourd’hui, on constate que l’inessentiel perturbe l’essentiel. On achète un objet plus pour sa capacité d’assortiment que pour son rôle.

On pourra, à l’instar de Baudrillard, montrer comment fonctionnent les structures de rangement et les structures d’ambiance dans l’habitat moderne. Parmi les structures d’ambiance, la couleur joue un rôle important.

Elle cesse d’être fonctionnelle. Ex.: le blanc était symbole de propreté et de pureté; on l’utilisait dans le monde médical et dans le sanitaire. Or aujourd’hui, il n’est pas rare de voir une salle de bains bleue, rouge, voire noire, ce qui est vraiment paradoxal.

En fonction du temps, on pourra expliciter l’un ou l’autre chapitre de Baudrillard. Mais la complexité du sujet peut rebuter certains élèves; voilà pourquoi je propose ensuite de passer à Perec.

 

3° ANALYSE DES «CHOSES» DE PEREC.

* Fiche technique de Perec

* Présentation globale du livre (Prix Renaudot en 1965)

* Analyse du roman.

En fonction du temps que l’on réserve à cette analyse, on peut faire un commentaire sur chaque chapitre. Ici je me contente de présenter des pistes de travail sur les chapitres les plus intéressants.

Dans un premier temps, j’insiste sur la structure du roman: deux parties inégales et un épilogue; et je fais remarquer l’absence du cadre spatio-temporel. (Dans le cas où l’on analyse également le Nouveau Roman dans cette classe, il y a des rapprochements à faire). Cependant le sous-titre (une histoire des années 60) permet d’ancrer le roman dans une réalité contemporaine.

Ensuite, il est essentiel de remarquer dès les premières lignes l’importance des objets au point d’effacer les héros qui ne seront nommés qu’au chapitre 2. Jusque-là, ils seront désignés par le pronom personnel «ils». On les voit agir sans les connaître, un peu à contre-jour, comme des ombres.

Autre originalité du livre, l’emploi du conditionnel. C’est le ton des jeux d’enfants. Le lecteur est ainsi projeté dans un double univers fictif: les personnages jouent et imaginent qu’ils vivent dans un tel lieu.

*

En entrant plus en avant dans le chapitre 1, on pourra faire l’inventaire des objets répertoriés. Toutes ces choses ont l’air d’avoir été choisies comme des signes d’appartenance à une classe sociale: la bourgeoisie bien installée.

Les héros vont s’épuiser à avoir en croyant que cela donne l'être.

Dans ce chapitre 1, on insistera aussi sur la technique descriptive utilisée par Perec. Pour éviter de sombrer dans le statisme inhérent à la description (Ricardou disait qu’elle enlise le récit), Perec utilise des verbes qui nous invitent à découvrir progressivement les lieux. Les choses nous mènent à…

Tout le milieu du 2e paragraphe nous montre bien la réduction d’un objet à sa forme et à sa matière. C’est un univers inhumain, c’est le bric-à-brac d’une civilisation qui ne veut pas s’avouer industrielle. Le fonctionnel y est laid, l’esthétique décoratif.

L’objet rêvé prend une telle consistance qu’il nie l’homme et va d’ailleurs le détruire.
Comment Jérôme et Sylvie (les deux héros) vont-ils vivre dans cette société de consommation?

Chapitre 2

L’analyse du chapitre 2 doit permettre de faire une comparaison entre le lieu rêvé et la maison réellement habitée par Jérôme et Sylvie. Cette page peut se lire comme un pastiche de «La pension Vauquer» tirée du «Père Goriot» de Balzac. Notons la disparition des pluriels remplacés par un singulier bien misérable.

Les chapitres suivants montrent les héros dans leur quête des choses. Perec en profite pour caricaturer les enquêtes que sont obligés de faire les héros pour avoir un peu d’argent.

Chapitre 4

Le chapitre 4 est intéressant car il évoque la source de référence des héros, «L’Express». En présentant son couple modèle, Perec montre comment leurs comportements sont déterminés par la MODE.

C’est ici que peut intervenir un débat sur ce phénomène en incluant, si possible, le vécu des élèves. Perec met en cause la société de consommation des années 60.

Chapitre 5

Ce chapitre est une réflexion sur la précarité de la situation des héros. Voir le champ lexical du bonheur. Perec se moque et présente ses héros comme de grands enfants qui s’amusent.

A comparer avec le champ lexical de la décomposition qui mène au vide dans le chapitre 8.

Le chapitre10 évoque leur sentiment de frustration qui est de plus en plus grand. Les richesses hyperboliques de certains gros propriétaires terriens contrastent avec leur misère. Le début du chapitre renvoie d’ailleurs au livre de Zola «Le ventre de Paris» . (Encore une opportunité de multiplier les éclairages).

La deuxième partie, plus courte, décrit la tentative de fuite des héros. Le départ en Tunisie doit leur ôter la tentation du luxe.

On peut comparer la description de l’appartement de Sfax (2e partie, ch.1) et l’appartement parisien (1re partie, ch.2).

Cette expérience se révèle être un échec.

L’épilogue: le futur remplace le conditionnel. On revient les deux pieds sur terre, dans la réalité.

 

4° PROLONGEMENT

Après l’analyse du livre de Perec, on peut prolonger la réflexion par la découverte de magazines qui vantent à loisir la consommation d’objets «inutiles» mais cadrant bien dans un univers bourgeois. («Art et décoration», le supplément «Week-end» du «Vif-l’Express»…)

Enfin on terminera par une tentative d’explication d’un phénomène de consommation: le GSM.

En montrant que s’il était au départ le signe distinctif d’une appartenance à une classe intellectuelle aisée, le GSM est devenu pour beaucoup (et notamment pour les classes sociales défavorisées) le moyen de rejoindre, dans l’apparence, cette élite.

Le désir de se hausser dans la hiérarchie sociale est bien légitime et le GSM semble être le reflet d’une vie bien occupée, aisée, intellectuelle où les contacts sociaux nombreux assurent à l’individu une certaine notoriété dans la société.

Je devrais dire «semblait être le reflet», car la démocratisation de l’objet (certains ne coûtent que 2500frs, avec abonnement gratuit, x heures gratuites à l’activation, etc.) fait qu’il est devenu un phénomène de mode accessible à tous et que bientôt sera remarqué celui qui n’en possèdera pas un.

Ajoutons à la réflexion que paradoxalement, au moment où techniquement il s’agit de libérer le consommateur (en supprimant le fil qui le retient au téléphone) jamais ledit consommateur n’a été plus esclave de son instrument puisqu’il l’accompagne partout…même à la plage.

Mais c’est sans doute parce qu’il permet la communication en tout lieu qu’il a autant de succès, notamment chez les jeunes.

Christian Munster
début de l'article

MARX

La production ne fournit pas seulement des matériaux aux besoins, elle fournit aussi un besoin aux matériaux, quand la consommation sort de cette grossièreté primitive, perd de son caractère immédiat - et s’y attarder serait le résultat d’une production enfoncée encore dans la grossièreté primitive - elle est elle-même sollicitée par l’objet comme cause excitatrice. Le besoin qu’elle éprouve de lui est créé par la perception de cet objet. L’objet d’art - et pareillement tout autre produit - crée un public sensible à l’art, capable de jouir de la beauté. La production ne produit donc pas seulement un objet pour le sujet, mais un sujet pour l’objet.

La production produit donc la consommation: 1° en lui fournissant des matériaux; 2° en déterminant le mode de consommation; 3° en excitant dans le consommateur le besoin des produits posés par elle comme objets.

Elle produit donc l’objet de la consommation, le mode de consommation, la tendance de la consommation.

MARCUSE

…Au contraire, se détendre, s’amuser, agir et consommer conformément à la publicité, aimer et haïr ce que les autres aiment ou haïssent, ce sont pour la plupart de faux besoins.

( …) le travail en question est socialement nécessaire, mais il ne l’est que socialement, c’est-à-dire au sens où, s’il n’existait pas, le mode de production établi ne pourrait pas se maintenir.

Georges PEREC,

Les choses, incipit (premier paragraphe) du roman, p. 9, coll. J'ai lu.

L'œil, d'abord, glisserait sur la moquette grise d'un long corridor, haut et étroit. Les murs seraient des placards de bois clair, dont les ferrures de cuivre luiraient. Trois gravures, représentant l'une Thunderbird, vainqueur à Epsom, l'autre un navire à aubes, le Ville-de-Montereau, la troisième une locomotive de Stephenson, mèneraient à une tenture de cuir, retenue par de gros anneaux de bois noir veiné, et qu'un simple geste suffirait à faire glisser. La moquette, alors, laisserait place à un parquet presque jaune, que trois tapis aux couleurs éteintes recouvriraient partiellement.

Du même auteur :

Le théâtre engagé, à partir de La résistible ascension d’Arturo Ui, de B. Brecht, 3e degré

http://docpedagfrancais.be/Sitelmdp/chmubrecht.html

Avec D. Avet, L. Muselle et le Pr. L. van Delft, Regards croisés croisés sur La Bruyère, 2e degré

http://docpedagfrancais.be/Sitelmdp/ammv.html

Site de l’Association Georges Perec :

http://www.associationperec.org/

Sur Karl Marx (accès aux textes via le site ABU)

http://agora.qc.ca/mot.nsf/Dossiers/Karl_Marx

Autres articles téléchargeables parus dans LMDP :

http://docpedagfrancais.be/Sitelmdp/archives.html

 

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