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Ressources pour la classe de français dans l'enseignement secondaire * Revue trimestrielle

Copie autorisée pour usage pédagogique non lucratif et avec mention de la source

1. Marguerite Yourcenar, Une femme "unis vers elle" - 2e & 3e degrés * Ouvrir
2. Regards croisés sur le coquelicot: le peintre, le poète, la chanson populaire - 1er et 2e degrés * Ouvrir
3. Classes hors-les-murs: flagrants délits d'évasion! - 1er degré :
Vosges * Hautes Fagnes * Gilly en Suisse * Edgar Morin: l'interdisciplinarité

Rappel: En Belgique - Scolarité obligatoire de six à dix-huit ans.
Primaire, 6 années. * Secondaire, 6 années comptées de 1 à 6, réparties en 3 degrés de 2 années chacun.

1. Les Vosges * Projet pluridisciplinaire :
Le Paris-Bresse... Découvrir les Vosges, en classe et sur place.
CNDB, Virton * Récit d'Emmanuelle Florent

La réalisation de ce projet a occupé le second semestre de l'année scolaire 2003-2004.

Tout a commencé en décembre 2004. Interpellée par le manque de motivation d'une partie non négligeable de la classe de 2e C, par le manque de dynamisme, de curiosité, de volonté d’en savoir plus, d’aller plus loin, j’ai tenté de trouver une solution. D’autres professeurs de cette même classe ressentaient exactement la même chose et ils étaient prêts à s’y prendre autrement pour continuer une année scolaire dans des conditions un peu meilleures.

Nous nous sommes alors lancés dans la pédagogie du projet et avons ainsi demandé aux élèves de la classe ce qui les intéressait vraiment. Une tempête d’idée plus tard, un projet s’est mis en place.

Soulignons tout de même que les élèves ont été « orientés » quant au choix concret du projet. Il a fallu allier leurs idées, leurs désirs et les nôtres en fonction de nos possibilités propres également (programmes, temps pour une mise en place rapide…).

Nous avons donc décidé d’écrire une histoire, un récit poétique et fantastique ayant pour cadre le massif des Vosges (lieu de destination du voyage d’étude de la classe en mai). Le point commun entre les différents cours serait les cinq sens, les sensations, le monde sensitif et bien entendu les Vosges.

Le séjour dans les Vosges s'est passé à La Bresse. [Le titre du récit, Paris-Bresse, vient d'une confusion chez les élèves qui croyaient que la pâtisserie bien connue se nommait Paris-Bresse, et non Paris-Brest.]

Bernadette Delit, professeur de sciences, a étudié avec les élèves les cinq sens d’une manière plus rigoureuse avec des expériences.

Pour le goût par exemple, elle leur a fait déguster des bonbons vosgiens, leur a demandé de reconnaître les différents parfums, les ingrédients qui composaient ces bonbons et puis, les élèves ont ensuite appris le mécanisme de fabrication des bonbons en question avec les transformations chimiques qui s’opéraient à un moment donné …

Pendant ce temps, moi, professeur de français, je leur faisais déguster aussi un bonbon, les yeux fermés en leur demandant ce que cela leur inspirait. A quoi pensaient-ils ? De là, a commencé notre récit.

Avec François Zucco, professeur d'étude du milieu, ils ont étudié le paysage vosgien, la faune, la flore, le climat …

Shirley Farnir, professeur de dessin, les a aidés à pratiquer différentes techniques vues en classe, pour illustrer les différents épisodes de leur récit.

Le récit des élèves passe habilement d'une légende à l'autre: celle d'une fille étrange habitant les Vosges, "née de l'union de l'esprit de la forêt, sa mère, et du vent, son père (...) les loups la veillaient comme si elle fût des leurs..."; et celle de Benoît, un garçon de Paris, issu d'une famille honorable, avide d'inconnu: l'aventure surprenante qu'il vivra lors d'une excursion scolaire à La Bresse dans les Vosges l'inspirera plus tard, lorsque, devenu un pâtissier parisien renommé, il créera le Paris-Bresse, un gâteau qui deviendra une célébrité gastronomique; "le Paris-Bresse fit la une de tous les journaux. Seul, Benoît savait ce que ce nom signifiait pour lui."

"Notre récit, disent les élèves, est un clin d'oeil sur la fraîcheur de la jeunesse.

2. Les Hautes Fagnes, hier et aujourd'hui:
Décrire un milieu de vie à travers les cours d'EDM, de sciences et de français
IND, Arlon * Récit de Jean-Luc Léonard

CADRE:
Semaine sportive (mi-temps pédagogique) à BUTGENBACH pour des classes de 2e rénové.

POURQUOI?
Durant cette semaine en mi-temps pédagogique, nous organisons une quinzaine d’heures de cours alternant visites et heures de classe (travaux à partir de dossiers en français, math, langue, EDM, sciences, religion). Les dossiers d’EDM, de sciences et de français, quant à eux, se recoupent, s’interfèrent, se complètent... puisqu’ils abordent des milieux proches et différents dans l’espace et dans le temps, appartenant à la région des Hautes-Fagnes.

QUOI et COMMENT?

* écouter, comprendre, utiliser des informations données pendant les visites (écouter)

* rédaction de réponses sous forme de phrases correctement construites (écrire)

* observer, décrire, comparer, analyser, synthétiser (dans les trois disciplines)

Conclusion:
Le cadre et la situation permettaient ce genre de décloisonnement et nous avons profité de cette opportunité, mais ce n’est pas toujours possible. Il ne faut pas que cette pratique devienne artificielle, même si elle est enrichissante pour l’élève (et pour les profs).

3. De Gilly en Belgique à Gilly helvétique: l'interdisciplinarité dans un jumelage de classes

Les professeurs "belges" engagés dans ce projet sont Mmes Buttazzoni, Delcorps, Lacroix, Lagasse et Nokerman, MM. Bouillon, Cawet, Collard, Koskins, Mathues et Wérion

Les documents présentés ci-après illustrent deux démarches importantes qui conditionnent le bon déroulement du projet (séjour en Suisse, du 7 au 13 mai):

* tout d'abord la nécessité d'une définition précise de ce projet, pour en informer à la fois "l'institution" (Pouvoir Organisateur, Inspection...), les parents, et surtout les élèves.

C'est le but de la lettre du 22 mars, dont nous publions de larges extraits.

* ensuite, le souci - une fois le projet réalisé - de l'évaluer à partir d'une liste de compétences préalablement établie et portée à la connaissance des élèves " acteurs principaux du projet".

On ne s'engage pas à la légère dans un projet de cette sorte: il est crédible, et surtout efficace, dans la mesure où il est préparé soigneusement.

A. Un projet clairement défini

[Lettre communiquée pour information à l'Inspection générale du Ministère de l'Education de la Communauté française]

Monsieur,

                        Nous nous permettons de vous soumettre le dossier Classes de découverte des premières du premier degré du Lycée François de Sales à Gilly en vue d'obtenir l'autorisation d'organiser un séjour du 7 au 13 mai à Gilly en Suisse.
                        Pour que vous compreniez davantage nos projets et nos motivations, nous vous devons de retracer l'historique de notre projet final.
                       Entrés dans l'innovation du premier degré dès septembre 1993, nous avions déjà pu nous essayer en interdisciplinarité E.D.M.-français, en réalisant un projet "charbonnages" qui nous avait permis de constater le dynamisme et l'intérêt que les élèves apportaient à orienter leurs recherches, à participer activement pour mener à bien une exposition. Les parents, ainsi que les élèves primaires des environs, nous avaient témoigné, à ce moment, leurs marques de sympathie et d'encouragements.
                        Dès le moins de juin, invités à visiter l'exposition Gilly d'ici et d'ailleurs, il nous vient l'idée de poursuivre nos tentatives en proposant cette fois un premier projet sur Gilly Belgique en interdisciplinarité plus élargie puisque des professeurs d'éducation physique, d'E.S.T., d'informatique désiraient rejoindre l'équipe E.D.M.-français.
                        L'exposition Gilly à travers le temps fut une réussite. Vous pourrez en juger par les documents que nous vous joignons. Ils vous permettront de constater que, non seulement les élèves ont pu assumer leurs responsabilités, mais aussi qu'un groupe de parents enthousiastes ont organisé une soirée de clôture dont l'objectif était d'alléger nos frais à Gilly-Suisse pour des élèves en difficulté. Les nombreuses personnalités invitées et notre direction nous ont apporté leur soutien.
                       Dès le congé de Toussaint, Monsieur Koskins, éducateur, et Monsieur Wérion, professeur d'informatique, partirent en prospection à Gilly en Suisse pour vérifier les infrastructures et la sécurité nécessaires pour notre hébergement. Ils revinrent non seulement rassurants mais aussi dynamisés par l'accueil, les rencontres, les projets d'activités que nous proposaient les autochtones. Une projection du film ramené de Suisse nous apportait l'accord et le soutien des parents. Un plan d'épargne, pris en charge par l'éducateur, dès le mois de janvier, prévoyait un paiement étalé.
                      Pour compléter notre dossier, nous vous joignons les documents sur les compétences transversales mises en œuvre qui permettront aux élèves d'analyser un milieu contrasté (puisque, avant tout, agricole et viticole) par des échanges directs avec des personnes ayant des témoignages de vie différents.

[Nous ne publions, plus loin, que "compétences de base" et "compétences en français"]

Pour vous donner un bref aperçu des compétences disciplinaires traitées, nous vous résumons les activités prévues:

- E.D.M.: sur base d'enquêtes et de documents, nous appliquerons la grille d'analyse du milieu étudié pour Gilly-Belgique à celui de Gilly-Suisse.

- Français: rencontres avec l'équipe éducative et les élèves de Gilly-Suisse pour comprendre des "systèmes" éducatifs peut-être différents.

mise en parallèle et création de contes et légendes Gilly-Suisse et Gilly-Belgique.

- Education physique: utilisation des infrastructures sportives mises à notre disposition, mais aussi jeu de découvertes pour visualiser l'environnement.

- E.S.T.: application de fiches d'observation et d'analyse à la vigne, principale ressource de Gilly-Suisse.

- Informatique: sur base d'enquêtes et de documents, analyse du niveau de vie et du pouvoir d'achat à Gilly-Suisse et Gilly-Belgique.

De plus, nous nous proposons d'emmener les panneaux de notre exposition Gilly-Belgique et inviter les habitants à découvrir nos différences et nos particularités. Cela nous permettra de réexploiter les échanges, les discussions, les témoignages que les élèves ont déjà pu susciter lors de leur exposition.

A. Nokerman, professeur de français

début art. Gilly * haut de page

B. Des repères précis pour évaluer le projet

1.Compétences de base

	[Nom, prénom] est capable de	français	étude du milieu	sciences	éduc. physique	infor matique
1	utiliser les livres de référence	-	-	-	-	-
2	relever à partir de documents les informations recherchées	-	-	-	-
3	trouver les documents qui correspondent au questionnement	-	-	-	-	-
4	respecter les consignes de travail	-	-	-	-	-
5	découvrir l'action de l'homme sur l'environnement	-	-	-	-	-
6	comprendre les personnes qui sont différentes de nous	-	-	-	-	-
7	participer à un travail... de groupe	-	-	-	-	-
8	...de classe	-	-	-	-	-
9	... d'interclasses	-	-	-	-	-
10	respecter le code de vie établi de commun accord (éléves - éducateurs - professeur)	-	-	-	-	-
11	tenir ses documents - avec soin	-	-	-	-	-
12	- écriture lisible	-	-	-	-	-
13	élaborer un questionnaire d'enquête	-	-	-	-	-
14	identifier dans les données d'une enquête les informations correspondant au questionnement	-	-	-	-	-
15	retranscrire fidèlement des informations (orales et/ou écrites) reçues	-	-	-	-	-

2. Compétences disciplinaires français

	[Nom, prénom] est capable de	Objectifs atteints dans le cadre du projet	Objectifs atteints dans le cadre de la discipline	Objectifs atteints dans le cadre d'un autre projet
A	Lire
1	comprendre des guides touristiques en utilisant les livres de référence	-	-	-
2	orienter sa lecture suivant le projet (que recherche-t-on?).q	-	-	-
B	Parler
3	exprimer ses souhaits sur ce qu'on a vu, lu, entendu	-	-	-
4	présenter - à la classe les activités sélectionnées	-	-	-
	- à d'autres classes	-	-	-
5	formuler des questions à partir des exposés des élèves	-	-	-
6	exprimer son avis en respectant l'autre	-	-	-
C	*Ecouter*
7	être à l'écoute des autres pour sélectionner les activités communes - à la classe - à d'autres classes	-	-	-
D	*Ecrire*
8	établir une liste des activités en tenant compte des contraintes	-	-	-
9	compléter la grille horaire en respectant les contraintes après accord avec la (les) classe(s)	-	-	-

Aux élèves, le mot de la fin

Comme les élèves le signalaient à notre sous-directeur, lors de l'évaluation après le séjour, ils n'avaient plus l'impression d'être en français, en étude du milieu, en éducation scientifique et technologique.
Autrement dit, ils utilisaient leurs compétences interdisciplinaires avec n'importe professeur responsable du groupe.

D'où l'importance des nos réunions de coordination pendant lesquelles chaque professeur est mis au courant des objectifs poursuivis par ses collègues.

début article Gilly * haut de page

Edgar Morin, sociologue: "Ne pas rester enfermés dans des savoirs compartimentés!"

Des journées de travail réunissant des scientifiques et des littéraires ont été consacrées en mars 1998 à l'étude des résultats de la consultation Quels savoirs enseigner dans les lycées? organisée par Claude Allègre, ministre français de l'Education. Voici ce qu'en conclut le sociologue Edgar Morin.

«(...) au cours des quatre premières journées 'scientifiques', consacrées au monde, à la Terre, au vivant, à l'origine et à l'évolution de l'humanité, nous avons mis en évidence la manière dont les connaissance sont aujourd'ui reliées les unes aux autres. Les cadres traditionnels de notre culture, déterminés depuis Montaigne - le monde, la vie, la nature - se sont progressivement enrichis de connaissances scientifiques complexes et reliées les unes aux autres (...).

[A propos du second pôle, le 'littéraire'], nous avons vu à quel point la littérature, le cinéma, la poésie, les arts sont des écoles de vie. (...)

C'est précisément en permettant la connexion entre ces deux pôles, le scientifique et le littéraire, que l'on peut construire une culture commune, inventer de nouvelles humanités. Mettre en évidence les liens entre les différents savoirs ne peut qu'éveiller la curiosité des adolescents, comme celle de tout être humain désireux de se situer dans la communauté humaine et dans la vie en général.

(...) Ils [les lycéens] restent enfermés dans des savoirs compartimentés. Une nouvelle articulation de ces savoirs dissiperait l'ennui. Et l'enthousiasme et l'amour de l'enseignant, revivifiés, ranimeraient foi et enthousiasme.»

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