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SOMMAIRE 

numéros parus depuis 1990

 

 

 

 

Copie autorisée pour usage pédagogique non lucratif et avec mention de la source

 

Numéro 136 * Mars 2009

Sommaire

1. Pierre Brunson, Découvrir l'être mystérieux pour... faire de la grammaire, 1e degré

2. Pierre Lemaire, Lecteur chez soi, lecteur en classe: entre lecture autonome et lecture partagée, 3e degré

3. Jean-Luc Léonard, Des Ukrainiens dans mon école, de la 1re à la 6e

4. Paul Verheggen, Quand un air du Sénégal vous transporte à Namur

5. Un pastiche de Molière pour définir le mot boîte, 2e et 3e degrés

6. Document brut pour le débat * Annie Le Brun: Des mots qui dévoilent, ou des mots qui occultent? 3e degré

Les mots comme des ponts...

Je voudrais tant que chaque élève (...) puisse parler et écrire, comprendre et se faire comprendre et, par là, préfère toujours la puissance des mots à celle de la violence aveugle. Je voudrais tant que, quel que soit son parcours scolaire, il puisse trouver dans les mots et la grammaire enseignés, les outils pour se dire et donner le sens de ce qu'il fait et de ce qu'il est. Je voudrais que chaque enseignant qu'il croisera soit pour lui un pourvoyeur de mots selon la grammaire de sa langue. Un magicien prêt à partager les secrets de son art en puisant sans compter dans le réservoir inépuisable du vocabulaire de sa discipline. Offrir à chaque élève qui nous est confié le pouvoir de jeter des ponts entre lui et les autres.

Philippe Anselin, La Libre Belgique, 15.12.2008, p. 15.

 

Découvrir l'être mystérieux pour... faire de la grammaire, 1er degré

EXPRESSION ÉCRITE EN 2e SECONDAIRE

Récit: Pierre Brunson

document pour l'élève * objectifs & méthode * pour conclure

En guise de préambule, quelques propos d'experts sur l'écriture scolaire

Si l'enseignant veut remplir sa mission, il doit être lui-même un praticien; l'écrit ne peut être enseigné valablement que par quelqu'un qui a une pratique personnelle de l'écrit. De plus, l'enseignant doit écrire devant les élèves, avec eux, en intervenant au moment même du processus de production de l'écrit. 

Pierre Saget, Le Français dans le Monde, 192 (avril 1985), p. 52. Article intitulé Le plaisir d'écrire.

Ecrire, ce n'est pas seulement composer un texte "sans autre destinataire qu'un adulte évaluateur" (...), "un moyen de combler des manques" (...) "c'est donner à lire un texte, qui par cet acte de donation, va à la rencontre de lecteurs.

D'après Bernard Jay, Le français aujourd'hui, n° 157, juin 2007, pp. 83-84.

En écrivant, l'élève acquiert une forme nouvelle de pensée; ses pouvoirs et sa relation au monde s'en trouvent modifiés.

Danielle Manesse, Enseigne-t-on le français?, Cédic éd., 1975, p. 61.

 

 

Le document remis à l'élève

Mon nom::..........................................

Consignes du travail

Des phrases complètes, correctes, incluant des indices et rédigées sur dix lignes, me décrivent.

Je suis une ville, un site géographique, historique … A vous de deviner !

 

Exemple:

Je ne suis pas très haut et je semble bien paisible, pourtant mon nom reste associé à une catastrophe historique qui ébranla notre monde antique.

Pour l’instant, je dors plutôt bien mais le jour où je me réveillerai, je ferai à nouveau trembler de terreur toute ma région.  Je cracherai tant de cendres brûlantes que personne ne pourra m’échapper ! 

JE SUIS ?

Ton texte








Qui suis-je?...

Dans le document ci-dessus, le professeur a utilisé, sans doute spontanément,, différentes formes grammaticales. Il peut les faire reconnaître par la classe: expansions du nom, relatives, coordination, opposition (expression de l'- mais, pourtant), conséquence (expression de la - : je cracherai tant... que personne...), etc.

Ces formes grammaticales ont été préalablement rappelées et observées en classe    

 

OBJECTIFS

début objet mystérieux * sommaire et édito 136

 

1. S'exercer à rédiger un texte descriptif selon trois consignes

* tout en étant précis, il doit cependant ne pas dévoiler l'identité de tel objet ou de telle; sa lecture donc amorcer une recherche.(ménager le mystère, le suspense!)

* il doit contenir des formes ou notions grammaticales observées en cours d'année (expansions du nom, fonctions dans la phrase, coordination, subordination, opposition, conséquence, macanismes d'accord, etc...) 

*.il doit se limiter à dix lignes en format portrait A4 (corps 12 au clavier d'ordinateur)

 

2. S'exercer à rechercher et trater des informations:: atlas, encyclopédies, dictionnaire, Internet …

 

Ces deux activités seront l'occasion d'enrichir des connaissances géographiques ou historiques assez faibles chez les élèves de deuxième en général.    

MÉTHODE

 

a) Recherche à effectuer à domicile ou au C.D.I. de l’école

      Délai d'exécution: trois jours maximum.  

 

b)  Rédaction proprement dite en classe avec l’aide du BESCHERELLE si nécessaire. (durée : 1heure)

Aucune note, prise à la maison, ne peut être apportée en classe. (Il faut aussi dissuader l'élève de transgresser les consignes en mémorisant préalablement son texte: des petits malins peuvent y songer...!)

 

c)  Lors de sa correction, le professeur répond par écrit à la question posée par l’élève. 

    Dans le cas de l’exemple ci-dessus : Le Vésuve.

PROLONGEMENT

La remise des copies au professeur s’effectue individuellement : chaque élève lit sa copie à haute voix afin que la classe découvre le sujet « mystère » et enrichisse sa culture générale. C'est aussi l'occasion d'observer dans chaque production écrite tel ou tel mécanisme grammatical mis en oeuvre. 

L'élève peur illustrer le sujet choisi : posters, photos… qui peuvent être affichés en classe.

Deux travaux, parmi d'autres...

En apparence, mon territoire ressemble à une grosse molaire toute cariée. Pour avoir accès à ma rue commerçante, où tout est hors taxe, vous devez d'abord passer par deux contrôles de douane. N'oubliez pas de sourire au bobbies! Par temps favorable, on peut apercevoir le Maroc. J'abrite une petite grotte à mon sommet où des singes vous harcèlent. Je suis la porte d'entrée de la Méditerranée. Si vous n'avez  toujours pas deviné...: je me trouve à la pointe sud de l'Europe.

Marie M.

Je suis une ville du sud de la France, très touristique pendant les vacances. Un célèbre artiste a peint un de mes cafés. Mes arènes ont été rénovées, et plusieurs spectacles s'y déroulent tout au long de l'année. Des vestiges ont retrouvé dans le fleuve à côté duquel je suis située: ils sont présentés dans un musée antique. Mon théâtre est réputé pour être l'un des mieux conservés: des ballets ainsi que des concerts y sont organisés. Mon marché est l'un des plus beaux de Provence: olives et épices sont au rendez-vous. 

Sophie G.

  POUR CONCLURE

Cet exercice a été effectué ces trois dernières années.  Il suscite chaque fois beaucoup d’intérêt de la part des élèves grâce à la totale liberté de choix du sujet et à l’aspect « devinette ». 

La production écrite de chacun est valorisée par la mise en scène d'une lecture en public. La motivation peut ainsi jouer à plein. En outre, c'est là une façon parmi d'autres de se mieux connaître et apprécier. 

début objet mystérieux * sommaire et édito 136


Lecteur chez soi, lecteur en classe...

Entre lecture partagée et lecture autonome :

La Métamorphose de Kafka en 7e professionnelle

Récit: Pierre Lemaire

ouverture du chantier * décor et personnages * de l'incipit au dénouement * agir sur le texte

Lecteur: auteur de sens

C'est sans doute un des plus grands bonheurs de la pratique quotidienne de la lecture en classe : l'irruption de sens inédits jaillissant grâce à l'échange entre lecteurs. La signification d’un texte est quelque chose de discutable, elle se construit d'autant mieux qu'elle se partage. Ce faisant, elle nous construit à notre tour, elle nous élève comme auteurs de sens. À chaque lecteur appartient de construire cette signification, qui n’est nullement livrée une fois pour toutes dans le texte lui-même, ni révélée par la parole du professeur. Dans cette optique, chacun est égal dans le cercle de lecture, le professeur n'étant plus que le garant de l'échange, le régulateur du temps et celui qui renvoie les questions, reformule les acquis, aide à la synthèse.

Le dialogue donne aux élèves de comprendre que la lecture est alors une tâche réclamant d'y apporter du sien, une construction active d'hypothèses qui aide vraiment à maintenir le désir d'aboutir à la dernière page. Si les élèves semblent apprécier ce dispositif, c’est fondamentalement parce qu’ils trouvent, en interrogeant les textes, des éléments de réponse aux questions qui les préoccupent dans le secret de leur vécu.

Lire du Kafka: ouverture du chantier

début Kafka * sommaire & édito 136

Loin d'une expérience modèle prête à transposer, voici donc la relation d'un cheminement au long de plusieurs années de classes fort inégales, mais unanimes lorsqu'on les confronte à l'obligation de lire un texte long. Le nom même de Kafka, dès l'annonce du titre La Métamorphose,  que je propose depuis quelques années en classe de 7e professionnelle "assistant aux métiers de la publicité", éveille chez les élèves des à priori par ailleurs largement répandus : « cauchemar, absurde, ennui ».

La séance initiale est consacrée à aborder le texte par des voies indirectes. L'approche porte sur l'illustration de la couverture, qui ne laisse pas longtemps muets des habitués de l'analyse de l'image et de l'histoire de l'art. La comparaison entre les premières de couverture de diverses éditions — faciles à rassembler grâce au web — permet l'émergence de quelques premières pistes de réflexion : maladie, déprime, mutation, transformation, cauchemar… ; récit fantastique, science-fiction, autobiographie,…  Autant de notions à conserver en mémoire pour une mise au point ultérieure.

L'allégorie de l'insecte est assez facilement déchiffrée, au risque d'enfermer les lecteurs dans un cocon de sens confortable heureusement bien vite trop étroit. Les premières lignes du texte

En se réveillant un matin après des rêves agités, Gregor Samsa se retrouva, dans son lit, métamorphosé en un monstrueux insecte. Il était sur le dos, un dos aussi dur qu'une carapace, et, en relevant un peu la tête, iI vit, bombé, brun, cloisonné par des arceaux plus rigides, son abdomen sur le haut duquel la couverture, prête à glisser tout à fait, ne tenait plus qu'à peine. Ses nombreuses pattes, lamentablement grêles par comparaison avec la corpulence qu'il avait par ailleurs, grouillaient désespérément sous ses yeux.

« Qu'est-ce qui m'est arrivé ? » pensa-t-il. Ce n'était pas un rêve.

confirment le thème du héros transformé en animal. Mais ce qui intrigue, c'est le souci du narrateur de souligner par deux fois qu'il ne s'agit pas d'un rêve, d'un cauchemar. Les élèves hésitent : la vraisemblance, le réalisme sont d'emblée mis à mal. Le fantastique n'est pas non plus l'étiquette qui convient : aucun personnage ne vient douter de la réalité de la transformation de Gregor, les détails de sa description sont autant d'indices qui nous garantissent que nous avons bien lu. « Ceci n'est pas un rêve », pour pasticher Magritte, mais un simple effet d'écriture, que l'on peut en effet raccrocher au surréalisme du début du XXe siècle. Une parenthèse peut alors être ouverte pour y glisser quelques indications biographiques.

C'est aussi, peut-être, le moment d'un parallélisme entre l'homme et l'oeuvre : Kafka//Samsa. La répétition de la consonne initiale en 4e position et celle de la voyelle A à la finale des deux noms est-elle signifiante ? Cette question a surgi d'avoir superposé sans le vouloir ces deux noms au tableau : elle a mené la classe à s'interroger sur la création des noms de personnages. Elle trouve bon an mal an un écho très fécond en significations, lorsque certaines classes trouvent opportun de rapprocher le frère et la soeur, Gre-gor et sa soeur Gre-te, pour mieux les opposer.

Décor et personnages  

début Kafka * sommaire & édito 136

L'espace, et l'atmosphère qui se dégage de la description de la chambre de Grégor, sont appréhendés par une tâche qui : dessiner un décor fidèle au texte. Les indications sonores ne sont pas négligées et sont traduites sans problème en gouttes de pluie à la fenêtre ou en onomatopées. Le dessin au crayon noir rend plutôt bien l'atmosphère. Une séance de comparaison des réalisations révèle les différences et les divergences entre les points de vue : la taille et l'apparence du héros surtout sont le sujet de vives controverses et de relectures à la recherche de preuves.

Un premier élément du décor étant planté, la lecture des pages suivantes est confiée à chacun avec la consigne de poursuivre le plan de l'appartement de Gregor par le repérage des indices textuels utiles. L'image d'une prison ou d'un labyrinthe résume bien la plupart des comptes rendus à la leçon suivante.

Les personnages de la cellule familiale occupent vite le devant de la scène et apportent leur lot de questions et d'interprétations : conflit entre les générations, lutte sans merci entre le père et le fils, relations difficiles avec le monde du travail, communication en crise au sein de la famille, incapacité du héros à nouer une relation adulte avec les femmes : sa mère, sa soeur, l'étrange dame munie d'une toque et d'un boa en image au mur de sa chambre, auxquelles on ne manquera pas d'ajouter les femmes de ménage qui se succèderont après le premier chapitre.

L'étrange figure du père en particulier s'impose comme l'objet d'une métamorphose inverse : à mesure que le fils s'étiole et s'épuise à tenter de sortir de sa chambre, le père retrouve vigueur, prestance et autorité. Même sa robe de chambre et son vieux manteau se sont mués en uniforme strict, bleu à boutons dorés, avec une casquette ornée d'un monogramme doré.

Pour assoir l'étude des personnages et s'exercer au dialogue argumentatif, un jeu de rôles est proposé : les personnages doivent être attribués avec beaucoup de diplomatie, et rares sont les candidats spontanés à se mettre dans la peau de Gregor! Selon les groupes, il faut évidemment pouvoir ajuster ou modifier la distribution des personnages, et concéder quelques infidélités au scénario de Kafka.

Réunion de famille chez les Samsa : on ne peut plus garder Grégor !

À travers le jeu de tes condisciples, devine la consigne qui leur a été donnée. Rédige cette consigne à la fin du jeu de rôles pour chacun des personnages.

Gregor : promet de chercher un autre emploi s’il peut rester à la maison avec sa famille

la mère : hésite entre garder son fils et rester d’accord avec son mari. Pleure, se lamente, se désole, est totalement incapable de décider.

Le père : veut placer Gregor chez sa tante, « cela ne nous coutera presque rien »

la soeur : veut aider son frère à chercher un autre emploi et quitter la maison

le fondé de pouvoir : Gregor perd son emploi. Le fondé de pouvoir est furieux, il annonce que Gregor a perdu son emploi et refuse de le recommander à un autre employeur.

la bonne : en a assez de nettoyer la chambre de cette créature dégoutante ! veut quitter cette maison de fous

le concierge : en a assez d’entendre les cris et les bruits de dispute, portes qui claquent, allées et venues dans l’escalier, loyer payé en retard, … il parait aussi que la chambre de Gregor est dans un triste état. Les Samsa doivent quitter l’appartement.

Si la Métamorphose est le récit d'une transformation du héros, c'est aussi celle des autres personnages : cela ne fait guère d'hésitation chez les élèves en ce qui concerne la figure paternelle. Forts de cette découverte ; il leur est désormais devenu plus commode de percevoir dans l'opposition entre Gregor et sa soeur Grete, un transfert de « l'énergie vitale ».

Le travail des élèves se poursuit à travers plusieurs phases de lecture : à haute voix en classe, passages essentiels à préparer en lecture individuelle, partage des pages à lire à la maison avec consigne de raconter simplement le contenu aux condisciples à la séance suivante. Les chapitres II et III seront ainsi peu à peu parcourus : la classe aboutit de la sorte à découvrir l'affirmation de la primauté du personnage de Grete au prix de la descente vers la mort de son frère.

De l'incipit au dénouement

début Kafka * sommaire & édito 136

La simple comparaison formelle entre le dénouement et l'incipit constitue un dernier exercice dans ce parcours, de manière à permettre, en embrassant l'ensemble du récit, de relire, de relier quantité de notes de lecture restées en attente.

 

 

SITUATION INITIALE

SITUATION FINALE

PERSONNAGES

GRE-gor Samsa (seul)

 

la famille Samsa : le père, la mère et GRE-te

TEMPS CHRONOLOGIQUE

En se réveillant un matin

depuis déjà des mois

TEMPS MÉTÉOROLOGIQUE

pluie, temps maussade, frissons glacés

chaud soleil

LIEUX

petite chambre, fenêtre

ils quittent l’appartement pour un autre plus petit, plus pratique, moins cher

entre les quatre murs de sa chambre - en face d'un hôpital

prendre l’air à l’extérieur de la ville

le souci des correspondances ferroviaires

le wagon, banquettes confortables, tramway

ATMOSPHÈRE

le temps maussade le rendit tout mélancolique

après des rêves agités

ils évoquèrent des perspectives d’avenir

ces rêves nouveaux et ces bonnes intentions

ACTIONS

il se retrouva métamorphosé

Grete s’était épanouie

ses nombreuses pattes grouillaient désespérément

il se traîna lentement sur le dos

ils virent leur fille se lever la première et étirer son jeune corps

elle s’animait de plus en plus

des contacts humains qui ne deviennent jamais cordiaux

il allait être temps de lui chercher (…) un mari

Chaque personnage à vrai dire a subi une métamorphose, c'est un nouveau sens découvert par le travail de lecture. Et le dénouement apparait ainsi aux antipodes de l'impression initiale de « cauchemar, absurde, ennui ». La Métamorphose, c’est bien plus que la transformation de Gregor en insecte. C’est un nouvel équilibre familial, et l’épanouissement de Grete en particulier.

Agir sur le texte...  

Enfin, la tâche d'évaluation finale consiste, selon les années, dans la réalisation d'une planche de BD ou dans la rédaction d'une lettre d'adieu de Gregor à sa famille. De lecteur, l'élève est invité à devenir auteur, à se permettre des innovations, à s’autoriser à agir sur le texte. En quelque sorte, il devient par sa lecture acteur de sa propre transformation.

début Kafka * sommaire & édito 136


Des Ukrainiens dans mon école

Un partenariat linguistique et culturel

Arlon en Belgique (INDA) et Tcherkassy en Ukraine (First City Gymnasium)

  Récit: Jean-Luc LÉONARD  

ДОБРО ПОЖАЛОВАТЬ

langue française en Ukraine * des Ukrainiens dans mon école * pour un bilan

 

C'est l'histoire, commencée en 2001, et qui se poursuit, d'une collaboration entre une école belge et une école ukrainienne, et surtout d'une amitié solidement nouée. LMDP se réjouit d'y faire écho ci-dessous.

La raison d'être de LMDP n'est-elle pas, en effet, de promouvoir toutes formes d'échanges d'expériences au service de l'enseignement du français? Ce que nous rappelle Saint-Exupéry, sur la valeur de l'échange, dans Citadelle

Хто нічим не обмінюється, той ніким і не стає.

 

 

 

Janvier 2001

Elena Aboskalova débarque dans une de mes classes pour deux mois. L'année suivante, ils seront sept ! 

Octobre 2008

C'est le huitième séjour d'un mois pour des étudiants ukrainiens à l'INDA et dans des familles d'accueil. Ils sont dix: cinq anciens et cinq nouveaux... un très grand cru !

L'asbl « Ukraine – Deux Luxembourgs »

Elle finance principalement un partenariat médical et sanitaire avec des hôpitaux ukrainiens et intervient également dans les frais des visites culturelles durant le séjour linguistique. L'asbl ainsi que l'INDA procurent également une bonne partie du matériel pédagogique pour la classe de français de Tatiana Mokrouchina au FCG (First City Gymnasium de Tcherkassy).

(Pour en savoir plus)

Apprendre le français en Ukraine: quelques repères...

début Ukrainiens * sommaire et édito 136

Le First City Gymnasium de Tcherkassy. (FCG)

Cet établissement scolaire d'enseignement primaire et secondaire mixte est une école qui offre la possibilité d'étudier 12 langues différentes :  l'ukrainien (qui est la langue officielle), l'anglais (1ère langue obligatoire), le français, l'allemand, l'espagnol, le russe, le polonais, l'italien, le tchèque, l'arabe, le japonais et l'hébreu moderne. 

Il y a environ 200 élèves qui suivent les cours de français sur les 622 élèves du FCG. Une de nos stagiaires, Mylena, est partie après sa dernière année (11ème chez eux = 5ème secondaire chez nous) faire ses études supérieures à l'université de Prague : elle parlait l'ukrainien, le russe, l'anglais, le français, l'italien et s'est mise au tchèque pour ses études en droit international.

Tatiana et moi avons pu également organiser un stage FLE (3 semaines) pour deux régentes de l'ILES à Tcherkassy et j'ai moi-même passé trois séjours FLE au FCG.

Tatiana Mokrouchina.

Cette professeure de français du FCG qui accompagne le groupe des étudiants ukrainiens à Arlon pour la 7ème fois est la professeure ressource de la ville de Tcherkassy (290.700 hab) et de la région pour l'enseignement du français. Elle utilise la méthode communicative de « Belleville » (chez Clé International). Elle parle et comprend extrêmement bien le français. Durant son séjour à Arlon, Tatiana tient à suivre un maximum de cours de français au fond des classes de l'INDA.

Certains de ses élèves obtiennent d'excellents résultats aux Olympiades et au DELF.

Le DELF (Diplôme d'Etudes en Langue Française)

Les épreuves du DELF sont organisées dans différents pays par le Ministère de l'Education français.

En Ukraine, les épreuves se déroulent à Kiev et sont payantes. Après avoir passé et réussi les 4 niveaux (A1, A2, B1, B2), les participants peuvent s'inscrire au DALF (Dipôme approfondi en Langue française) qui permet de s'inscrire dans n'importe quelle université de langue française.

Les élèves retenus pour le stage à Arlon s'engagent évidemment à passer ces épreuves. Pour l'année 2008, 23 élèves de Tatiana ont réussi des épreuves du DELF à différents niveaux.

Les Olympiades

Les villes, les régions et la nation organisent des « Olympiades » dans différentes disciplines scolaires. Ces épreuves sont officielles. Les mieux classés des trois premiers des Olympiades de la ville participent aux Olympiades régionales et les trois premiers de ces Olympiades participent alors aux Olympiades nationales. En 2008, 5 élèves de Tatiana étaient retenus pour les Olympiades nationales (ce qui est exceptionnel pour un pays plus grand que la France). Quatre de ces participants se sont classés dans les trois meilleurs de leur catégorie (ce qui est encore plus exceptionnel !). Ces quatre-là étaient venus à Arlon; le cinquième pas !

Il est nécessaire de dire que celui ou celle qui se classe dans les trois premiers au niveau national dans la catégorie 11ème année se voit attribuer de très importants avantages pour son inscription et a la possibilité de faire des études supérieures gratuites dans une université de son choix.

Je me permets de signaler qu'une année d'université coûte plus cher à Kiev qu'une année pour un étudiant belge en Belgique (que j'estime à 10.000€) en sachant qu'un enseignant ukrainien gagne entre 300 et 400 euros par mois.

On peut alors comprendre ce côté « battant », volontaire et déterminé des étudiants.

Des Ukrainiens dans mon école...

début Ukrainiens * sommaire et édito 136

La préparation au séjour.

Tout commence vers le mois de février. Tatiana m'envoie la liste des étudiants retenus pour le séjour. Son choix est déterminé selon différents critères :

*   se débrouiller correctement en français (vouloir comprendre et parler)

·  être motivé par le stage en acceptant les contraintes (vie en famille et en classe pendant un mois)

· s'engager à participer aux épreuves DELF et aux différentes Olympiades et y obtenir des résultats

Le choix de Tatiana est très délicat. Pourquoi l'un et pas l'autre. D'un côté, elle reprend des anciens étudiants qui viennent approfondir et de l'autre, elle propose des nouveaux qui vont venir découvrir et peut-être revenir.

Je signale que l'aspect financier ne doit pas intervenir. Il est arrivé que l'asbl ou des familles belges interviennent financièrement pour les frais de voyage de certains étudiants motivés.

La liste est alors sur mon PC et je recontacte les familles qui ont déjà accueilli et qui acceptent d'accueillir à nouveau le même étudiant. Pour les nouveaux, je suis aidé par des collègues et la direction, qui me renseignent des familles potentielles. Aucune famille n'est choisie au hasard.

Je leur fais parvenir un document qui explique le « partenariat ». J'ai plus de refus que d'accord « pour en parler ». Je ne veux d'ailleurs jamais savoir leurs raisons. C'est oui ou non pour une entrevue avant de décider. Je passe généralement une soirée de 1h30 à 2 heures dans chaque nouvelle famille pour expliquer, répondre aux questions, donner des informations... avant qu'elles ne prennent leur décision finale.

Quand les familles sont trouvées, j'attends de leur part un certain nombre de documents exigés par l'Ambassade de Belgique à Kiev (dans une enveloppe fermée) :

-         une « annexe 3 bis » délivrée par l'Administration communale (service étrangers) qui constitue une « prise en charge » de la personne accueillie par la personne qui accueille et qui décharge la commune de tous frais inhérents à son accueil

-         une composition de famille

-         une photo de la carte d'identité de la personne qui accueille

-         la photocopie des fiches de salaire (trois derniers mois) de la même personne

-         une invitation collective que je rédige moi-même

-         j'ajoute également une fiche signalétique générale reprenant les noms et les informations concernant les responsables, les étudiants, les n° de passeport, les familles d'accueil, les adresses des uns et des autres, les n° de tél, les adresses e-mail...

Tous les documents rassemblés sont ensuite envoyés à Tatiana par recommandé, qui vérifie avant de déposer l'ensemble à l'Ambassade de Belgique à Kiev avec les passeports pour obtenir les visas.

Quant à Tatiana, elle doit également rassembler un certain nombre de documents et d'autorisations (ville, école, parents...) qui doivent être traduits en français et reconnus par un notaire.

Nous encourageons les étudiants à prendre contact avec leur future famille d'accueil par Internet et des échanges se font avant leur arrivée.

Lés étudiants reçoivent également un dossier « Petits conseils pour un bon séjour. » que les anciens présentent aux nouveaux. Ces petits conseils portent aussi bien sur la vie à l'école que sur le séjour en famille d'accueil.

L'arrivée

Les étudiants arrivent alors à Trèves après deux petites journées de route en car de ligne. Des familles d'accueil vont les chercher et tout le monde se retrouve sur la Place Léopold généralement au milieu de la nuit.  

Le séjour en famille

Pour les anciens, pas de problème d'adaptation; pour les nouveaux, il est nécessaire de donner un certain nombre d'informations pratiques : habitudes, repas, utilisation des vannes thermostatiques, douche et eau chaude, utilisation d'Internet, horaires, linge à lessiver, recyclage...

Cette adaptation se fait progressivement et comme chaque famille a des habitudes différentes, il est difficile de les préparer avant. Il leur est conseillé d'observer attentivement, de poser des questions, de ne jamais dire oui s'ils n'ont pas compris, d'agir comme les enfants de la famille, de participer à la vie de famille, d'échanger un maximum...

Chaque famille est libre également d'organiser des visites de villes, d'endroits intéressants, de musées... suivant ses disponibilités. Les étudiants participent également aux mêmes activités que les enfants de la famille : piscine, mouvements de jeunesse, sports... quand cela est possible.

L'école

Chaque étudiant est intégré dans une classe suivant son âge et doit suivre tous les cours organisés dans l'horaire de sa classe. Nous l'encourageons à réaliser tous les travaux et à passer les tests comme n'importe quel autre élève, dans la mesure de ses possibilités. Il a également les mêmes permissions que l'enfant de la famille d'accueil, reçoit un journal de classe, une carte d'étudiant, les feuilles de cours, les photocopies...

Comme je ne fonctionne plus dans l'école, ce sont deux jeunes collègues qui encadrent Tatiana et les étudiants.

Mon rôle est d'organiser et d'informer (par courriel) Tatiana, les accompagnatrices, la direction, les familles. J'accompagne également les 2 ou 3 excursions/visites organisées par l'asbl (Bruxelles, Luxembourg, Metz...) Je suis également disponible pour dépanner les familles.

A la découverte de la Ville de Luxembourg

Belgique - Ukraine: l'amitié!

 

Pour un bilan...    

début Ukrainiens * sommaire et édito 136

·          ce séjour se veut essentiellement linguistique et culturel : il ne s'agit ni de tourisme ni de vacances, ni d'accueil humanitaire mais d'immersion complète

·          au niveau de l'apprentissage du français, les retombées sont exceptionnelles. Lors des dernières olympiades de la ville, en novembre 2008, les élèves de Tatiana ont obtenu 12 prix sur 15 et ils avaient tous participé au moins une fois au stage en Belgique. Ces 12 élèves participeront ensuite aux Olympiades régionales.

·          plus de 40 familles ont déjà partagé le plaisir d'accueillir et de réaccueillir un étudiant ukrainien

·          il est vrai que ce séjour demande beaucoup de temps au niveau de l'organisation de part et d'autres mais la richesse de ces rencontres est très motivante  

·          lors de ces séjours à Arlon et de mes séjours à Tcherkassy, j'ai appris à ne jamais ni critiquer, ni comparer... seulement échanger. C'est aussi la devise de LMDP.

  Vouloir partager et sa langue et sa culture tout en s'ouvrant à celles de l'autre, accepter les différences, communiquer... est un véritable bonheur.  

Jean-Luc Léonard

Dernières nouvelles

Tania vient de m'annoncer également les résultats des Olympiades régionales (Oblast de Tcherkassy) où ses élèves ont remporté 7 prix sur 9 en français.
                1er et 3ème prix (11ème année = dernière secondaire)
                1er, 2e et 3e prix (ex aequo) (10e année)
                1er et 2e prix (9e année)


début Ukrainiens * sommaire et édito 136

Quand un air du Sénégal vous transporte à Namur

Une histoire en trois épisodes, par Paul Verheggen

un enchantement, d'abord * une prise de conscience * scandaleusement solidaires * la presse en parle

Dans le Larousse, au mot transporter...
(...)
 Littéraire. Susciter chez quelqu'un un sentiment très vif : La nouvelle le transporta de joie.
 (...)

1. Pâques 2008 - Voyage au Sénégal : le message d'un chanteur

Pâques 2008

Au bord de l'océan. Trente degrés sous les palmiers. Un orchestre de six musiciens me surprend par une chanson peu connue en Europe: la femme sans haine. Je filme pour me rappeler ce moment magique.

Retour en Belgique

De retour en Belgique, une recherche sur cette mélodie qui m'obsède. J'explore l'univers musical d'Ismaël Lô.

Femme sans haine...

cette chanson donne un aperçu de la condition féminine au Sénégal. Le thème de mon prochain AFP - atelier de formation pratique - avec les futur(e)s enseignant(e)s de français / religion est tout trouvé: l'analyse de cette chanson.

Cela se passe à l'Hénam...

Ces futurs enseignants fréquentent le département pédagogique de la Haute Ecole namuroise (Henam) situé à Malonne, près de Namur

Ismaël Lô, La femme sans haine

 

Album Iso (1994), écouter et voir sur:

http://www.deezer.com/track/la-femme-sans-haine-T2328272  ou  http://www.dailymotion.com/video/x15f38_la-femme-sans-haine_music

 

Toutes les femmes sont des reines.
Certaines plus reines que les reines.
Elles disent des choses qui surprennent.
Elles brisent les hommes qu’elles enchaînent.
Cette chanson pour cette reine
Qui dit à son roi : «Maintenant
Je m’en vais avec le vent,
Avec les barbares d’Occident…»
Ce que tu n’as pas défendu par les armes
Ne crois pas le garder avec des larmes
Je m’en vais où ton peuple va
Je m’en vais, me chercher un autre roi…

Toutes les femmes sont des reines.
Sur terre, sur mer, neige ou désert
Derrière le voile des formes pleines
Il y a le mystère des sirènes.
Brûlez les villes, brûlez les bouges.
La flamme lèche et le fer touche
La chair vivante parle par la bouche.
La chair morte parle par la mouche.
Ce que tu n’as pas défendu par les armes
Ne crois pas le garder avec des larmes.
Je m’en vais où ton peuple va.
Je m’en vais, me chercher un autre roi…

Toutes les femmes sont des reines.
Dis-le à celle qui t’aime.
Ne pas vouloir devenir roi.
Ne change rien, c’est comme ça…
Voilà ce qu’a dit une reine
A un roi bon, vaincu, sans haine
Elle est partie comme s’en va la mer,
Quand la lune veut ça…
Ce que tu n’as pas défendu par les armes
Ne crois pas le garder avec des larmes
Je m’en vais où ton peuple va.
Je m’en vais, me chercher un autre roi…
Je m’en vais.
Je m’en vais.

2. AFP, Malonne: quand un air vous "transporte", comme dit le Larousse 

L'émotion

J'étais loin d'imaginer l'impact que celle-ci allait avoir sur mon auditoire. L'émotion partagée à l'écoute de cet air tout en retenue... Des demandes d'explications sur le Sénégal: ses moeurs, son mode de vie, ce besoin de venir à tout prix en Europe, les pirogues qui s'échouent aux Canaries, le tourisme sexuel..

Au-delà de l'émotion

Quelle action concrète en faveur d'amis lointains devenus si proches par la magie d'une chanson?!

 

3. D'un transport à l'autre: l'acheminement des colis 

début Sénégal * sommaire et édito 136

Dans le Larousse, au mot transporter...

(...)

Faire passer quelque chose d'un lieu à un autre : transporter des marchandises

(...)

 

Dans leur AFP, atelier de formation pratique, les futur(e)s enseignant(e)s ont affiché ce slogan : Devenez scandaleusement solidaires... 

Un mot d'ordre qui ne restera pas lettre morte. Très vite, le projet prend forme: les bénéficiaires en seront une maternité, une école de brousse et une pouponnière. Des colis s'entassent dans le local: quatre-vingts kilos de dons  rassemblés en un temps record : médicaments, fournitures scolaires (mallettes, crayons, cahiers, craies,…), habits du premier âge.

 

Bientôt professeurs, ils apprendront à leurs élèves l'importance de la communication verbale, qui crée des liens, qui construit les savoirs, qui développe la personnalité... Et ils entraîneront les jeunes à pratiquer le large éventail des formes de communication orale ou écrite, y compris les formes numérisées..

 

Pour s'y préparer, rien de tel qu'une situation on ne peut plus concrète qui nécessite des contacts de toutes sortes: les amis du Sénégal , les  agences de transport, les administrations, les assureurs... et aussi entre condisciples, avec des amis à solliciter. Quand ils seront "sur l'estrade" (comme on dit), ils sauront que l'échange de parole est capital. Cela va sans dire? Mais ça va tellement mieux quand on le dit. Quand la parole fait passer à l'acte!

 

 

Noël 2008 - Nouvel an 2009

début Sénégal * sommaire et édito 136

D'après Vers l'Avenir, 15 janvier 2009,  sous le titre Des colis de l'Hénam au Sénégal

 

Jeudi 25 décembre – Région de M’Bour /N’Gaparou à 80 kms au Sud de Dakar – En pleine brousse, à l’intérieur des terres.

Dans le respect des traditions locales des ethnies visitées, la distribution commence. L’étonnement devant cette manne providentielle s’efface pour une joie transmise à tous. Les villageois se rassemblent les uns devant leur chef de tribu, les autres leur instituteur ou encore l’infirmière responsable de la maternité, ou du moins le local sommaire qui fait office de lieu d’accouchement. Le sourire est sur toutes les lèvres sous un chaud soleil (30° à l’ombre) qui envahit les coeurs. Quel beau Noël !

 

Mercredi 31 décembre – M’Bour – ONG « Vivre Ensemble » - Pouponnière

Les habits pour bébés susmentionnés sont apportés à l’accueil de cette ONG recueillant une cinquantaine d’enfants de zéro à trois ans. Ceux-ci sont soit orphelins de mère (maman décédée pendant l’accouchement) soit placés suite au manque de moyens financiers des parents ou suite à des carences de ceux-ci.

La visite sollicitée par les responsables de cette association nous plonge dans les tréfonds d’une émotion aussi vive qu’inattendue. Les bébés maternés par des nounous nous tendent leurs menottes et s’agrippent à nos vêtements avec un besoin de tendresse indescriptible. Devant cette réalité injuste, les cœurs flanchent.

Instant ultime de l’émotion extrême : la présentation de nourrissons malades et handicapés.

L’espoir ténu de tous : l’adoption par ceux qui ont reçu beaucoup plus de la vie.

Toutes nos valeurs de riches s’estompent devant cette attente incommensurable d’amour.

C’est une certitude : notre réveillon de l’an neuf est à nul autre pareil !

Paul Verheggen

 Quelques documents pour élargir nos horizons: 

* Apprendre à vivre durablement * Le combat pour l'eau, sur  http://www.greenbelgium.org/troubledwaters/ Dossier pédagogique (manuel pour le professeur, livret Toute l'eau du monde, feuilles de travail,dvd avec deux petits films,48 photos,5 posters * Public: 2e & 3e degrés * Prix: 12€

 

* Sur la notion de migrant et le parcours d'un migrant: Le DVD Une girafe sous la pluie, de Pascale Hecquet, publié par la Ligue des Droits de l'homme. Public: enfants 4-12 ans. 13 minutes... Prix: env. 9€. Commande: formation@liguedh.be

A Djambali, toute l’eau est monopolisée pour alimenter la luxueuse piscine de sir lion. Une girafe téméraire décide que cette situation a assez duré...

 

* Sur le site (belge) http://www.dgcd.be/fr/index.html de la Direction générale de la Coopération au Développement, sont présentés les programmes d'action en Afrique. 

Parmi les publications, le périodique Dimension 3, Magazine trimestriel d'information et de sensibilisation sur des thèmes de la coopération au développement.

 

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Pour définir le mot boîte, pasticher les Fourberies de Scapin de Molière

Un exercice d'écriture signé Jacques Vallet

Remaniement de l'article publié en version "papier" dans le numéro 97 (juin 1999) de LMDP

2e et 3e degrés

Contraintes imposées, contraintes choisies* réécriture de J. Vallet * Propositions pour exploiter le document * boîte dans le Petit Robert

Quelques préalables bien utiles...

* Aller au théâtre * Présenter rapidement l'intrigue des Fourberies de Scapin. Voir/écouter la scène VII de cette pièce de Molière 

[plusieurs enregistrements sont disponibles à la Médiathèque (de la Cté française de Belgique) - http://www.lamediatheque.be/ en support microsillon, compact ou vidéo] 

 

* Faire du théâtre * Faire lire à haute voix ou - mieux encore - mettre en scène ce texte de Jacques Vallet

[pour cela, faire appel, quelques jours auparavant, à des élèves doués pour l'expression théâtrale]

 

Molière, Gide, La chanson de Roland: Préparer les élèves à comprendre certains clins d'oeil intertextuels: 
      l'olifant de Roland - le fantôme de Gide et son "invite" Que veux-tu, mon garçon?

 

* Explorer le lexique * Lire la définition du mot boîte dans le Petit Robert [voir annexe]

[dans l'émission des Décraqués, c'est ce dictionnaire qui sert à vérifier si les différents emplois du mot à définir ont bien été pris en compte]

Jacques Vallet définit le mot boîte

Le 11 septembre 1998; l'émission récréative et littéraire des Décraqués, sur France-Culture, était consacrée à une nouvelle session du Petit rimailleur illustré, vaste et plaisante entreprise visant à la création d'un dictionnaire versifié de la langue française.

Ce jour-là, les deux mots à définir sont boîte et mais (conjonction), la définition de ce second mot étant confiée à l'écrivain Patrice Minet.

Contraintes imposées...

Pour définir le mot boîte, l'écrivain Jacques Vallet devra évidemment se soumettre aux deux contraintes d'écriture du Petit rimailleur illustré, et qui sont rappelées par Bertrand Jérôme, animateur de l'émission, à savoir:

* rédiger en vers

* prendre en compte toutes les acceptions du mot à définir, ainsi que que les unités lexicales comprenant le mot à définir (ex. boîte à outils, boîte de Pandore...)..

... et contraintes choisies !

Mais l'écrivain va y ajouter librement d'autres contraintes:

* composer la définition sous la forme de scènes de théâtre,

* réécrire à la façon de Molière dans Les fourberies de Scapin,

* insérer quelques allusions littéraires, sortes de clins d'oeil à un public averti.

«J'ai fait une petite pièce de théâtre, explique-t-il. J'ai fait un acte avec trois scènes. Un acte en vers; et c'est une fourberie, où j'ai repris des personnages de Scapin. Et c'est un peu une scène qui a pu être perdue - de Molière - quelque part, et que j'ai essayé de retrouver. Le titre, c'est La Boîte

Voici donc cette définition du boîte par Jacques Vallet, versifiée, théâtralisée, inspirée des Fourberies de Scapin, agrémentée de quelques clins d'oeil et allusions littéraires.

[ Il s'agit de la scène VII de cette oeuvre de Molière, à lire sur le site http://abu.cnam.fr/ à partir de la page http://abu.cnam.fr/cgi-bin/go?scapin2,1876,1895 ]

La Boîte

début pastiche des Fourberies * sommaire & édito 136

        Scène I. - Le facteur, Géronte.

 

Le facteur, derrière la porte.

[1] Toc. Toc. Il y a quelqu'un? Toc. Toc.

Géronte.

Que me veut-on?

Le facteur.

[2] Monsieur, j'ai une lettre de votre fiston.

GÉronte, à part.

[3] Ah! le pendard! C'est encore mon bien qu'il convoite.

Au facteur:

[4] Une lettre! Ah, ah! Jetez-la dans la boîte.

Géronte, seul. Il lit la lettre et se lamente.

[5] Oh disgrâce! Oh ciel! Misérable que je suis!

[6] Mon fils, retenu dans une boîte de nuit!

Il a perdu au jeu: la somme est rondelette.

Les ravisseurs me somment de payer sa dette,

Sous peine de ne pas le retrouver vivant.

Il appelle.

[10] Scapin! Scapin! Où es-tu encore, sacripant?

        Scène II. - Géronte, Scapin, puis des apparitions.

Scapin, entrant.

[11] Me voilà.

À part.

Décidément, ce vieillard m'exploite.

[12] Je ne resterai plus longtemps dans cette boîte.

Géronte

Où étais-tu, traître? Je te cherchais partout!

Mon fils est kidnappé. On en veut à mes sous!

Scapin, à part.

Bien! C'est la tempête dans sa boîte crânienne!

[16] La lettre a fait son effet; il faut que j'obtienne

[17] Le magot.

GÉronte, bourru.

Qu'est-ce que tu marmonnes, brigand?

Puis, se radoucissant, il lui tend la lettre.

[18]  Tiens. Lis. La maffia russe m'a pris mon enfant.

Tu dois, Scapin, puiser dans ta boîte à malices:

Pour berner ces voleurs d'un de tes artifices,

Si tu prenais sa place?

Scapin

Écoutez! Il est mort

Si vous ne sortez pas de votre coffre-fort,

Rapidement l'argent que ces gens-là convoitent.

GÉronte

[24] Mais que diable allait-il faire dans cette boîte?

Scapin, le pressant.

[25] Il n'est plus temps de se lamenter. Pauvre enfant!

[26] Il  est perdu! Tenez, j'entends son olifant.

Entre la première apparition, le paladin Roland. Roland met l'olifant à ses lèvres; il l'embouche et sonne à pleine force. Scapin le chasse.

GÉronte, gémissant toujours:

[27] Mais que diable allait-il faire dans cette boîte?

Scapin, le suppliant.

[28] Hâtez-vous, le temps presse, et la porte est étroite!

Entre André Gide. Le fantôme de Gide:

[29] Que veux-tu, mon garçon?

Scapin, se précipite sur lui, excédé.

Toi, ta boîte! Ça suffit!

Il le chasse, et marmonne.

[30] Mais qu'est-ce qu'ils ont tous à revenir ici,

[31] Ces diables qui sortent de leur boîte?

A Géronte:

Monsieur,

[32] Oh, que de temps perdu! Vous pouvez dire adieu

[33] Hélas, pour toujours, à votre progéniture.

[34] Peut-être est-il déjà dans la boîte à ordures.

GÉronte

[35] Mais que diable allait-il faire dans cette boîte?

Scapin

[36] Laissez donc cette serinette maladroite

[37] Et passez la monnaie.

Géronte

Hélas, mon pauvre petit.

[38] Maudite boîte!

Et il sort.

Scapin, seul.

La boîte lui tient l'esprit.

[39] Dieu! Il suit son obsession en ligne droite.

[40] Si jamais il découvre que je le mets en boîte,

[41] J'ai intérêt de changer de vitesse. Filons!

Il se heurte à Géronte qui revient.

   

        Scène III - Scapin, Géronte.  

Géronte rentre avec un petit coffret de fer, soulève le couvercle.

Scapin, à part.

[42] Dans les petites boîtes, les bons onguents...!

Géronte sort une liasse de billets, hésitant.

[43] Bon, va vite, Scapin, délivrer mon fils.

Il remet l'argent dans la boîte et la referme.

Scapin.

[44] Oh là! oh là! Pour qui jouit seul, le plaisir boite!

Il tend la main. Géronte le regarde, surpris, puis se résigne à se séparer de ses économies.

Geronte, se lamentant encore.

[45] Mais que diable allait-il faire dans cette boîte?

Scapin, en se sauvant:

[46] Le ciel, de mes efforts, enfin me récompense:

[47] Au fond de la boîte de Pandore est l'espérance

            Rideau.

Aussitôt après, quelques commentaires en studio:

Patrice Delbourg - On dirait vraiment du Molière. (...)

Jacques Vallet - Ça boite un peu par rapport à Molière. (...)

Bertrand Jérôme - Pourquoi pas un dialogue, dans un dictionnaire, après tout?

Quelques pistes pour exploiter le document  

début pastiche des Fourberies * sommaire & édito 136

Le style, une prison dans un champ libre - Léo Ferré

L'art naît de contrainte... - André Gide

1. Une réflexion sur l'écriture littéraire

* La "prison", ce sont les deux règles imposées à Jacques Vallet: rédiger en vers une définition du mot boîte dans l'ensemble de ses acceptions (cela sera contrôlé dans un dictionnaire).

A ces deux règles, Jacques Vallet en ajoutera librement une troisième: pasticher une scène des Fourberies de Scapin ("Que diable allait-il faire dans cette galère!"), versifiée en alexandrins (l'original est en prose), assortie de didascalies, de clins d'œil allusifs (Roland et l'olifant, pédérastie de Gide,  maffia russe...) dans un jeu d'anachronismes.

Bref, le défi lancé à soi-même de produire malgré (grâce à?) la rigueur des contraintes.

* Dans cette prison des contraintes, le "champ libre", c'est la panoplie des moyens d'expression à la disposition du scripteur. Pour un expert de l'écriture, cette panoplie est immense!

2. Construire un spectacle

                                         avec les matériaux du lexique

On peut demander aux élèves de vérifier, eux aussi - comme cela s'est fait en studio - si Jacques Vallet a effectivement pris en compte tous les emplois du mot à définir:

boîte aux lettres * boîte de nuit *  boîte crânienne * boîte à malices * " ta boîte" * diables sortant de leur boîte * boîte à ordures * mettre en boîte (qui induit comiquement, dans la ligne suivante Changer de vitesse) * "dans les petites boîtes, les bons onguents" * la boîte de Pandore * et surtout "boîte" dans le sens de lieu maudit... 

[pour Scapin, ce lieu maudit est la demeure de Géronte - vers 12 ; tandis que, pour Géronte, le lieu maudit est la boîte de nuit où son fils est retenu - vers 24 et autres].

                                           … et dans un travail intertextuel

1. Ce travail est d'abord la réécriture de la scène célèbre du "Que diable allait-il faire dans cette galère?" dans les Fourberies de Scapin, de Molière (acte II, scène 7).

Cette réécriture est à la fois conformité et transgression.

Conformité à certains procédés du modèle;

par exemple: le pendard v. 3; ô disgrâce, ô ciel v. 5; qu'est-ce que tu marmonnes, brigand - v. 17 etc; et surtout le refrain Que diable... que Scapin qualifie irrévérencieusement de "serinette" - v. 36.

Faire rechercher par la classe d'autres imitations du langage théâtral (apartés, exclamations...).

 

Transgression par le recours à des tournures résolument actuelles ou empruntées au langage populaire: fiston - v. 2; boîte de nuit -v. 6; (rester) dans cette boîte - v. 12; kidnappé - v. 14; maffia russe - v. 18); etc.

Faire rechercher par la classe d'autres transgressions.

 

2. Le jeu intertextuel consiste également à convoquer, coup sur coup, 

La chanson de Roland, épopée médiévale [v. 26] 

et André Gide, auteur du 20e siècle (son roman La porte étroite) [v. 29]

    

    * l'épopée (l'appel de l'olifant) par un parallélisme entre le péril de Roland et celui du fils de Géronte;

    * le second, par un artifice plus subtil, qui enchaîne

            la métaphore de la porte étroite,

            l'apparition du fantôme de Gide, éveillé aux enfers par ces trois mots qui font "tilt et... titre",

            l'appellatif (mon) garçon qui sous-entend des invites suspectes que Scapin a tôt fait de rejeter.

 

 

Quelques livres de Jacques Vallet

L'endormeuse, éd. Le Cherche-Midi, 2007 [fresque historique sur l'année 1938]

Une coquille dans le placard, éd. Zulma, 2000 [un polar dans le milieu de la presse écrite].

L’amour tarde à Dijon, 1997, Baleine (Le Poulpe: série de polars humoristiques).

Annexe: le mot boîte dans le Petit Robert (2003)

début pastiche des Fourberies * sommaire & édito 136

boîte [bwat] n. f.

• XIe boiste; lat. pop. °buxida, class. pyxis 

1¨ Récipient de matière rigide (carton, bois, métal, plastique), facilement transportable, généralement muni d'un couvercle. Le fond, les parois d'une boîte. Une boîte en carton (Þ carton), en fer. Boîte de conserve. Ellipt Haricots en boîte. « Une vraie sauce ! Pas une en boîte ! » (Duvert). — Boîte vide. Þ emballage. Boîte à, destinée à recevoir (telle chose). Boîte à ouvrage, pour ranger les menus objets de couture. Boîte à outils. Boîte à ordures. Þ poubelle. Boîte à bijoux. Þ  coffret, écrin. (Québec) Boîte à lunch : gamelle. Boîte de, contenant (telle chose). Boîte d'allumettes, de couleurs. Boîte de sardines. — Fig. et fam. METTRE QQN EN BOÎTE, se moquer de lui, le faire marcher. Mise en boîte. Þ moquerie.

à Par ext. Contenu d'une boîte. Avaler une boîte de chocolats.

2¨ Spécialt Loc. Boîte à malice, à surprise*.

à Boîte à musique, dont le mécanisme reproduit quelques mélodies.

à Boîte à gants. Þ vide-poche.

à Boîte aux lettres, à lettres : dispositif installé sur la voie publique, destiné à recevoir le courrier à acheminer par le service postal; boîte privée d'une maison où le facteur dépose le courrier. Boîte à lettres électronique (sur Minitel). Þ messagerie. Boîte vocale*. Fig. Servir de boîte aux lettres, d'intermédiaire dans un échange de lettres, de messages.

à  Boîte postale : boîte aux lettres réservée à un particulier ou à une entreprise, dans un bureau de poste (abrév. B. P.). Þ région. case (postale).

à Boîte à onglets*.

3¨ Par anal. Cavité, organe creux qui protège et contient un organe, un mécanisme. — (1833) Anat. Boîte crânienne : partie du crâne qui renferme le cerveau. — Techn. Boîte d'essieu, de roue : pièce conique fixée dans le moyeu d'une roue. Þ chapeau, fusée. — Cour. Boîte de vitesses : organe renfermant les engrenages des changements de vitesse.

à BOÎTE NOIRE : (aviat.) appareil électronique enregistrant certaines données du vol (altitude, vitesse, etc.) et destiné à en contrôler a posteriori le déroulement; (techn.) dispositif dont on connaît la réponse à un signal d'entrée, mais dont on ignore le fonctionnement interne.

à Boîte de dérivation, permettant, dans une installation électrique, de réaliser des dérivations, une jonction.

à Magasin* (d'une caméra). Loc. C'est dans la boîte : c'est filmé.

4¨ Par anal. Fam. et péj. Maison, entreprise, lieu de travail. Changer de boîte. — Arg. Lycée. Þ  bahut. Boîte à bachot.

5¨ BOÎTE DE NUIT : petit cabaret ouvert la nuit où l'on boit, danse, et qui présente des attractions. Ellipt Aller en boîte. Une boîte de jazz.

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Document brut pour le débat: 

 

des mots qui dévoilent ou des mots qui occultent?

Source: Annie Le Brun, poète, écrivain et philosophe. France-Culture, journal de la mi-journée, 30.01.2009.

 Il y a un langage qui se développe en continuel déni de réalité. et on s'en rend de moins en moins compte. Cela commence dans le langage technique, où on a parlé de la bombe propre, de frappes chirurgicales, de la croissance zéro, de la croissance négative... 

On voit bien là quelle est cette fonction du langage, un langage qui interdit la contradiction, avec des formules ritualisées qui sont bien frappées pour être reçues pour tout le monde, et de telle sorte qu'on ne peut plus les contester, parce qu'elles contiennent une chose et son contraire; et du coup, il y a une sorte de sidération, et ça a une fonction hyptonique, anesthésiante, qui va permettre de tout avaler.

Dans la crise, on voit des discours qui ont cette fonction hypnotisante. Et tout se passe comme si on n'avait plus les moyens d'arrêter cette machine: on perd la relation entre la cause et l'effet. Conséquence: on est prêt à accepter tous les ersatz de la communication.

(Quelques traits d'oralité - hésitations, reprises, ponctuants... - n'ont pas été retranscrits.)

http://www.radiofrance.fr/

Annie Le Brun, spécialiste de Sade, d'Aimé Césaire, d'Alfred Jarry, de Raymond Roussel, du surréalisme

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