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JULIBEL, le français d'aujourd'hui

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SOMMAIRE 

numéros parus depuis 1990

 

 

Publiés en version "papier" de septembre 1993 à mars 2004, les numéros 074 à 116 de la revue pédagogique LMDP seront progressivement mis en ligne.

Une cinquantaine d'articles parus dans cette série sont déjà sur notre site Internet : voir la page sommaire (titres en couleur rouge) ou la page archives. * Suivre cette mise en ligne

 

Numéro 081 - Juin 1995

Mis en ligne : 12.2014

 

Sommaire

Vécu, affects et réécriture de récits - L'élève se projette dans son écrit

Littérature de jeunesse: renouveler le choix de livres pour le premier degré  

Des élèves "sans titres" pour un journal sans titre (4e professionnelle)

Une classe de sixième rencontre un écrivain, Xavier Deutsch

Plaisir de lire - Pour une typologie des "plaisirs de la lecture". Un texte de Roland Barthes            

                          

Édito

"changer le visage de l'école"

Comment motiver une classe, si le professeur n'est pas motivé? C'est une attitude contraire au projet. Il faudrait dans ce cas se remettre en question, se recycler ou laisser la place à une autre personne.

 L'ensemble des actions menées par les différentes équipes éducatives va faire naître un climat favorable à l'épanouissement dans le respect des valeurs que l'on représente.

Donner du pouvoir aux élèves par des responsabilités actives peut changer le visage de l'école.

F. GRÉGOIRE, inspecteur de mécanique-électricité, Propositions, mai 1995, p. 22

 

 

VÉCU, AFFECTS

ET RÉÉCRITURE DE RÉCIT

Par Dominique BUCHETON

Dans la rédaction de ses récits personnels, le "sujet-collégien-écrivain" projette son expérience, ses sentiments, son désir... Comment en tenir compte dans l'apprentissage de l'écriture?

Ça prend beaucoup de vérité pour écrire des mensonges.

Guy Cloutier, écrivain québecois

Nous publions ici le début de la première partie (pages 21 à 23) et un extrait de la conclusion (p. 29) de l'article de Dominique Bucheton paru dans le numéro 108 (décembre 1994) de la revue de l'AFEF (Association française des enseignants de français, 19, rue des Martyrs, 75009 PARIS), Le français aujourd'hui. Dans cette première partie, l'auteur examine "la prise en compte des affects, de la subjectivité et globalement de la personnalité de l'élève dans les pratiques de classes".

Dans la seconde partie, D. B. donne "quelques-uns des résultats de deux recherches qui, au travers de l'analyse attentive de textes d'élèves plusieurs fois réécrits, ont mis en évidence les traces linguistiques de ce jeu complexe des affects dans le texte". La troisième partie "trace les perspectives didactiques que ces premières conclusions permettent d'envisager."

Avec l'aimable autorisation de M. Jean-Louis Chiss, rédacteur en chef de la revue Le français aujourd'hui.

 

 

 

La question discutée ici manque un peu de modestie: en effet, il ne s'agit pas d'envisager la didactique de l'écriture sous l'angle habituel de la "maîtrise de la langue ou des textes", mais de s'intéresser de manière centrale au "sujet écrivant", à la manière dont il construit son rapport à l'écriture, à sa propre écriture tout au long de sa scolarité. Certains, sans doute, trouveront le projet irréaliste, insaisissable, dangereux même. D'autres souriront de la banalité du propos: voilà bientôt 30 ans ou plus que cette question est au cœur de leurs pratiques.

[...]

De quelques paradoxes et malentendus

 

1.    On n'échappe pas en classe au surgissement du psycho-socio affectif.

édito & sommaire 81 - début Bucheton

               Commençons par deux exemples pour expliquer le propos:

- A Toulon, dans une école privée qui accueille les enfants des milieux aisés de la marine militaire, l'imaginaire des élèves est fait de récits de grandes croisières, des hauts faits de marins glorieux, de l'angoisse de la famille lointaine, de la maison. On y lit aussi le spectre de la retraite: il avait été renvoyé de son bateau, à moins que ne s'y superpose celui du chômage, fléau qui touche pourtant peu leurs familles. La vie, leur vie, est là dans tous les textes. [Il s'agit d'une rédaction-portrait en CM2 à partir d'une gravure qui n'a rien de maritime.]

- A Trappes (collège ZEP en banlieue parisienne), deux enfants de la même classe de 6e, issus de milieux fort opposés, traitent très différemment la consigne leur demandant de relater la découverte d'un trésor.

               Pour l'un, tout l'intérêt du récit est, dans la peur du noir, l'affrontement des dangers que recèlent ces hauts lieux initiatiques et mystérieux que sont les souterrains d'un château. Le trésor en lui-même est sans intérêt: lorsqu'il est trouvé, il disparaît dans une explosion. La transgression est de courte durée:

«...Une fois dans la grotte ils allumèrent la lanterne, ils virent une cléf. La grille avait une serrure alors machinalement ils essayèrent d'ouvrire la grille. Ils se couchèrent avec une frayeur pas croyable. Les chauve-souris se reposèrent au plafond comme toutes les chauve-souris. Les deux enfants se relevèrent et repartirent. Ils arrivère devant une grille identique à la première il l'ouvrirent avec la cléf et ils virent le trésor. Mais en s'approchant ils déclenchèrent une bombe. Par frayeur ils repartirent par l'entrée secrète, lorsque la bombe explosa le château se détruit et il n'y plus de trésor.» [début du texte coupé]

     Ce texte, pour un enfant qui entre en 6e, est scolairement très acceptable. Il est très cohérent, mais standard. On y retrouve tous les stéréotypes des romans d'aventure type club des cinq. La lecture des romans et feuilletons plébiscités par les enfants de cet âge a-t-elle façonné l'imaginaire de Bruno? Ou bien la fréquentation de ces romans lui a-t-elle donné des outils pour dire ces affects courants à son âge? On laissera la réponse au titre de l'ouvrage de Brunet: Car la lecture donne forme à l'esprit (Paris, Eshel, 1991).

     Pour l'autre, Amadou, les péripéties dans le souterrain sont omises, la seule chose qui importe au personnage est de garder ce trésor et de le faire accepter par la tribu familiale, d'où toute une série de salamalecs et autres intercessions, sous forme de discours direct mal maîtrisé, au grand-père, à l'oncle, à la mère, afin que le père, personnage absent de la scène, accepte.

«paul va dans la maison de oncle gile avec jean, ils creusèrent et ils virent l'entré, ils déscendère jean trouva une clé, paul trouva à son tour une clé il ouvra, il vis le trésor pièce d'or, diamant, rubis, pierre précieuse.

. On est riche, on est riche, vite partons ils couraient à toute jambe - grand père tu ne dira rien à personne on partage l'or, brulont la carte avant que quelqu'un la découvre. Vient paul ont rentre n'au parents doivent s'inquiéteé, couront, maman nous somme riche regarde ne dit rien à personne sinont je quite la famille - papa va être surpris nen apprenant ça je le sais: tu sais j'ai envient d'acheté des chaussures pour l'hiver dacor? oui mon chéri! [texte complet]

Autre milieu, autres préoccupations, autres discours, autres valeurs, autre transgression. Le premier texte est jugé ennuyeux par la majorité des lecteurs adultes qui ne s'y investissent pas mais qui le trouvent scolairement très bon; le deuxième, très loin de la fameuse «maîtrise de la langue», émeut. On s'en souvient. Il montre en peu de phrases les relations particulières qu'entretiennent les membres de cette famille et la position que le héros y tient. Ce n'est pas le monde de l'enfance qui y est dessiné, mais celui du clan.

               Qu'on le veuille ou non, le psycho-affectif pointe son nez dans tous les écrits narratifs, le contraire serait inquiétant puisque c'est là la fonction première du récit. [Ricoeur, Temps et récit, Seuil, 1984]  Cependant les maîtres évitent d'y toucher, généralement parce qu'ils ne savent pas trop comment le prendre en compte ou parce qu'ils ont peur de tout ce qui pourrait remonter à la surface. Mais surtout parce qu'on ne dispose pas vraiment d'outils d'analyse qui permettent d'écouter attentivement le «dit» des textes des élèves. (J'écris à dessein «écouter» et non évaluer!)

               Il donne à voir les valeurs, les passions, les discours des familles, les stéréotypes culturels et sociaux qui permettent aux élèves de se situer et de s'identifier. En même temps, il fait entendre une voix unique, celle de l'auteur-narrateur-élève. Les textes narratifs jouent visiblement, dès l'école primaire, cette fonction: développer, structurer le psycho et le socio-affectif. En cela, ils aident les élèves à se situer. Mais ce n'est pas cette fonction fondamentale du récit qui est le plus souvent visée.

2. Le malentendu

édito & sommaire 81 - début Bucheton

               Les enseignants se contentent trop souvent de situations d'écriture où on fait seulement semblant d'écrire, et ceci de manière caricaturale en collège. Mais a-t-on jamais appris à nager en brassant sur une chaise, à jouer de la musique les doigts dans le vide?

Très tôt, le bon élève comprend la tricherie et apprend à écrire sans rien dire, sans rien donner à voir. Il sait que l'on attend de lui essentiellement «une forme», une brillante «coquille».

Sur 45 adultes, enseignants et étudiants, à qui on demandait de faire l'analyse et la comparaison des textes de Bruno et Amadou, à peine 10% se sont inquiétés de ce que disaient les textes. Ont été minutieusement et finement décortiqués, le schéma quinaire, les types de discours, les marqueurs d'énonciation ou de temporalité, la désignation des personnages, etc., mais ce que disent, dessinent les deux textes, leur cohérence particulière, leurs enjeux dramatiques n'a pas du tout été aperçu ou jugé digne d'intérêt pédagogique. Seule la forme a été considérée comme devant faire l'objet d'une analyse macro ou micro structurelle.

Comment en effet traiter, prendre en compte ce «reste obscur et difficilement paraphrasable»? Et si ce «reste» était l'essentiel? Comment faire écrire, réécrire Amadou si on commence par nier sa parole et l'émotion qu'il a su faire naître chez le lecteur? Comment l'aider à entendre la spécificité de son texte et donc son intérêt, pour lui donner le désir de le développer, de le corriger? Comment le faire entrer dans l'espace de l'écriture et lui permettre d'en être membre à part entière? Le passage est délicat, la porte étroite pour le maître. L'avenir scolaire de certains élèves se joue ainsi parfois parce qu'une parole n'a pas été entendue.

[...]

·Conclusion

[les deux premiers paragraphes:]

               On a longtemps fait l'hypothèse pédagogique que les affects, le vécu, étaient plus un obstacle qu'un facteur du développement langagier. Dans les situations de classe aseptisées, où l'émotion, le vécu compliqué des affects n'est pas de mise, où le contrôle cognitif, la pédagogie par objectifs, sont les principes fondateurs, on a sûrement raison! Les «Amadou» n'ont aucune chance...

               J'ai voulu ici plaider la cause inverse et prôner une pédagogie qui s'appuie fermement sur le développement psycho-socio affectif du sujet élève, tenter de montrer qu'il y a tout intérêt pour son développement linguistique à trouver les situations d'enseignement qui laisseront de la place et du temps pour que ses affects, son vécu, sa pensée, son langage, puissent travailler ensemble.

(...)

[dernier paragraphe:]

               Tant il est impossible de travailler sur la langue, la parole, sans travailler avec la personne et son rapport au monde.

 Dominique BUCHETON

Université de Lille III, groupe de recherche Théodile

édito & sommaire 81 - début Bucheton

 

Littérature de jeunesse: Renouveler le choix de livres

Premier degré

 

 

Renouveler...

Trente ans de carrière... Trente fois, il a fait lire Topaze. Une histoire vraie!!!

 

 

 

 La pratique du texte "long" se répand de plus en plus au premier degré. Heureux élèves, si le professeur suscite chez eux le goût de la lecture et leur apprend à devenir des "lecteurs éclairés": capables de choisir, d'apprécier, d'exploiter leurs lectures! Par "texte long", il faut aussi entendre le documentaire -  exploration, aventure, vulgarisation scientifique... - qui peut constituer pour certains élèves une très bonne entrée en lecture. Voir

Parmi les textes de fiction, des valeurs sûres telles que Robert Sabatier, Marcel Aymé, Michel Tournier, Henri Bosco, Jules Verne... sont intelligemment exploitées. Pourtant, même ces excellents textes pourraient devenir des... ornières: il nous faut reconnaître ce risque d'une lecture qui, reprise trop souvent, peut ralentir l'élan d'une lecture créative! Nos élèves savent apprécier l'enseignant capable de renouveler d'année en année le choix des livres proposés à la classe.

D'où l'utilité

                     de s'informer sur les parutions récentes de très bonne qualité,

                     d'échanger entre professeurs pour savoir "ce qui marche" (n'est-ce pas la raison d'être de notre revue?),

                     de mettre l'élève au contact des bibliothèques, voire des écrivains...,

et il n'est pas utopique, non plus, d'imaginer que les élèves puissent eux-mêmes proposer à la classe des livres à parcourir ensemble: une façon intelligente de valoriser l'élève-lecteur-autonome-et-créatif.

Dans le numéro de mars 1995 de la revue le français aujourd'hui, Claude Hubert-Ganiayre propose pour le Collège  (12-15 ans...) une liste de livres récemment parus en indiquant pour chacun quelques champs d'observation, tels que:

         le découpage de la chronologie

         le décor comme support de la fiction (décrire/raconter)

         les "voix": qui s'exprime dans le récit?

           discours direct et discours indirect

         fonction de l'incipit (début du récit)

         les actants (les rôles)

            Etc.

Ces propositions - tout à fait réalistes pour le premier degré, et qui ouvrent aussi aux littératures étrangères - sont intéressantes, dans la mesure où, sans pédantisme,

elles préparent le terrain à des démarches plus fines développées aux deuxième et troisième degrés.

 

 

Voici cette liste:

Nina BAWDEN (trad. de l'anglais par Christelle Bécant), Un Petit cochon de poche, L'école des loisirs, Neuf, 1990.

Nina BAWDEN (trad. Florence Seyvos ), La Guerre de Fanny, L'école des loisirs, Neuf, 1991.

Jean-Noël BLANC, Fil de fer, la vie, Gallimard, Page Blanche, 1992.

Roald DAHL (trad. de l'anglais par Henri Robillot), Matilda, Gallimard, Folio Junior, 1988.

Valérie DAYRE, C'est la vie, Lili, Rageot, Cascade, 1991.

Chris DONNER, Les Lettres de mon petit frère, L'école des loisirs, Neuf, 1991.

Claude GUTMAN, La Maison vide, Gallimard, Page Blanche, 1989, repris en Folio Junior édition spéciale en 1993.

Peter HÄRTLING (trad. de l'allemand par François Mathieu), Béquille, Messidor/La Farandole, 1989, repris en Scandéditions/La Farandole, 1991.

Peter HÄRTLING (trad. de l'allemand par François Mathieu), Flo, Messidor/La Farandole, 1990, repris en Scandéditions/La Farandole, 1991.

Lois LOWRY (trad. de l'américain par Frédérique Pressmann), Le Passeur, L'école des loisirs, Médium, 1994.

Jona OBERSKY (trad. du néerlandais par Philippe Noble), Années d'enfance, Gallimard, Page Blanche, 1993.

Daniel PENNAC, L'Œil du loup, Fernand Nathan, 1984, Pocket Junior, 1994 [plutôt pour les 12-13 ans...].

Roberto PIUMINI (trad. de l'italien par Armand Monjo), La Verluisette, Hachette, Le Livre de poche Jeunesse, 1992.

édito & sommaire 81 - début choix de livres


 

Un récit de Chantal, Magali et Sandrine, IND, Saint-Hubert - Classe de Chantal Al Charif

Vingt-trois élèves - sans "titres" - pour un journal sans titre!

En 4e professionnelle services sociaux et travaux de bureau...

D'abord, les écouter...

Je m'appelle Cindy, et je suis en 4e professionnelle. J'en ai marre d'être exclue par d'autres parce que je suis en professionnelle.

Je m'appelle Tamara. Je suis en 4e professionnelle et je ne trouve pas normal que nous soyons exclus des activités des "rénové": excursion, théâtre...

Je m'appelle Alexandra et je suis en professionnelle. J'en ai assez qu'on dise que les professionnelles sont plus bêtes que les autres.

Lire ensuite leur récit...

Au début de l'année, nous avons décidé, pour financer nos futurs voyages, de créer un JOURNAL.

D'abord, nous avons "pris" un certain nombre d'heures pour visiter les expositions variées qui se tenaient à Saint-Hubert: Josse Goffin, la guerre 40-45, bijoux-parures au Palais Abbatial, la sidérurgie au Musée Redouté, des expositions-nature réalisées par des élèves de notre école, puis interviewer les responsables pour connaître leur façon de travailler, leurs motivations, leur but, autrement dit pour connaître aussi l'envers du décor.

Cela nous a obligés à rédiger des textes variés:

questions pour interviews, comptes-rendus différents, mots de présentation et de remerciement.

Dans un deuxième temps, comme la bibliothèque publique de Saint-Hubert est un endroit très fréquenté par les élèves de notre école, nous avons eu l'idée de rencontrer le bibliothécaire pour en savoir plus sur son métier et sur le fonctionnement d'une bibliothèque. Vu que celui-ci nous offrait gracieusement des bons de location pour des livres, nous avons inventé une pub - avec photos prises par nous - pour son établissement.

En parcourant les revues Talents, de Bayard-Presse, plusieurs idées d'articles nous ont traversé la tête: des textes où on demandait l'avis des lecteurs, des trucages de photos belles et humoristiques pour voir nos profs sous un autre angle et amuser nos lecteurs: nous avons photographié des profs et, avec leur accord, collé leur tête sur une image drôle qui leur convenait.

Dans un autre journal, nous avons trouvé un article «Bon de colère» qui convenait à l'ambiance survoltée de la classe; on l'a transformé pour se décoincer, se dérouiller et l'adapter à des élèves qui le liraient.

Continuant dans cette veine humoristique, on a rédigé des petites annonces attirantes et impertinentes et des présentations délirantes des élèves de la classe. Puis on s'est même permis de donner notre avis et de dire notre malaise en tant qu'élèves du professionnel.

Comme Béné s'ennuyait pendant les cours, elle a rédigé un article sur son idole Jim Morrisson. Pour la féliciter (et la contenter), nous lui avons accordé une demi-page du futur journal.

Enfin, nous avons imaginé un sommaire pas trop banal bien qu'incomplet.

Il ne restait qu'un titre à trouver: pas moyen de se mettre d'accord (l'essai avait été tenté à plusieurs reprises). "On n'a pas de titre" (c'est vrai dans tous les sens!): cette phrase plaisait à la majorité, et a donc été adoptée comme titre du journal.

Après Noël (comme vous voyez, ce journal a pris un temps certain), des élèves ont repris des articles pour les illustrer, pour calligraphier un titre, d'autres les corrigeaient au point de vue orthographique, d'autres les tapaient sur une vieille machine ou ordinateur dernier cri (d'où la diversité des caractères).

On voyait enfin le bout de ce travail passionnant, mais un peu long: la mise en page de tous ces articles. Heureusement que la photocopie existe!.

Au congé de carnaval, des publicités qui ont fait parler d'elles fleurissaient dans toute l'école, et notre journal était en vente!

Chantal, Magali, Sandrine, 11 avril 1995

édito & sommaire 81 - début "sans titres"

 

 

Rencontre avec Xavier DEUTSCH

3e degré

Un récit de Marie-Claire Hansel et de ses élèves de 6e, Institut de Nazareth, Messancy

...Ils ont été pris d'une frénésie de lecture!

 Dans le cadre de La fureur de lire d'octobre 1994, la Libre Belgique a publié Les Garçons, roman de Xavier Deutsch, jeune auteur au talent prometteur. Pour la modique somme de 26 francs, les élèves ont pu découvrir l'une des facettes de la littérature belge contemporaine.

 Les Garçons, Arthur Rimbaud, Frédéric et Quentin, lycéens de seize de la génération 1990, bédéphiles, aimant le rock et Novalis, ont pour jeune prof de français Madame Pauline, surnommée She said. Cette petite sœur de Robin Williams du film Le cercle des poètes disparus, transmet à sa classe sa passion pour la littérature:

 

 

«Maintenant, je vais commencer avec vous à explorer un continent... lumineux... brumeux... brutal, mais attention: ce qu'on explique, on le tue.»

 Après la lecture de cet hymne à l'adolescence, nous avons tenté de découvrir les clés du récit.

 Dans une première approche, nous avons travaillé l'intertextualité

 

 

 

         en littérature: Rimbaud, Apollinaire, Cendrars, Baudelaire, Novalis, Nerval, Le Clézio, Verlaine, Céline, Duras, Vian, Shakespeare, Saint-Exupéry...

         dans le cinéma: Le Cercle des poètes disparus, Birdy, La fureur de vivre...

         dans la chanson: Niagara, Springsteen, U2, Doors, Kaplan...

         dans la bande dessinée, la publicité, la peinture...

 Ensuite, nous avons abordé

l'étude des différents points de vue,

les figures de style, les connotations,

la mise en abyme,

le langage (Xavier Deutsch dans la lignée de Queneau, de Vian...),

la lecture plurielle,

la mise en rapport entre le début et la fin du récit.

 Au cours de ces recherches, les élèves se sont posé de plus en plus de questions sur l'auteur, le message qu'il a voulu transmettre, ses sources d'inspiration, la genèse du roman...

 Pour y répondre, il m'a paru intéressant d'inviter le romancier et d'ouvrir le dialogue avec la classe. C'est avec beaucoup d'enthousiasme et d'humour que Xavier Deutsch s'est prêté à ce jeu de la vérité. Ont été ainsi passés au crible:

-          ses lectures d'enfance (Petzi!, Tintin, Oui-Oui...).

-          ses références culturelles: «Pour écrire, il faut avoir beaucoup lu, intégré un réservoir de mots, avoir été amoureux (...); j'ai fait chacun de mes livres par amour pour quelqu'un; Les Garçons, par amour pour Rimbaud. Léonard de Vinci n'aurait pas peint La Joconde s'il n'avait pas été amoureux d'elle.»

-          ses motivations et son métier d'écrivain: «Je veux que mon livre agisse sur vous, vous donne envie de faire quelque chose.» - «Pour écrire, il faut des dons et les travailler, un minimum d'apprentissage et une hypersensibilité.»

-          sa définition du bonheur: «Continuer à faire ce que je veux librement, que la vie me réserve des surprises et rouler à toute vitesse vers le soleil.»

-          ses activités extra-littéraires: X. Deutsch consacre une grande partie de son temps à l'engagement humanitaire; il a notamment écrit un petit livre formidable relatant la guerre en ex-Yougoslavie...

Après cet échange avec le garçon auteur, Les Garçons nous sont apparus sous un jour nouveau. Et certains de relire le livre pour y pister les traces de l'écrivain. Tous, dynamisés par cette rencontre, ont été pris d'une frénésie de lecture...

 

Laissons-leur le mot de la fin:

 

 

L'auteur raconte l'histoire de jeunes qui essaient de trouver la Lumière, qui tentent de se surpasser, qui s'initient à la "vraie" littérature. Philipppe L.

Ce roman sur les jeunes, mais pas uniquement sur les jeunes, se termine sur des pages d'une beauté certaine qui nous laisse la larme à l'œil. Violaine G.

 Les Garçons: titre simple pour évoquer la complexité de l'adolescence de trois jeunes copains de seize ans. Isabelle L.

Le thème de l'adolescence est exprimé d'une manière très réaliste: il comporte un message de mise en garde face aux risques et aux difficultés de l'adolescence. Christophe G.

 Ce roman rend compte de la force du lien qui unit les adolescents. Mickaël R.

 L'auteur essaie de nous faire apprécier la littérature, tout en nous faisant réfléchir sur la vie et la mort. Ce livre est plein de symboles. Isabelle K.

 

En résumé, ce roman transcrit toutes les émotions qui animent un groupe d'adolescents, et leur vie n'est pas toujours facile.

Les Garçons, roman édité à l'École des Loisirs

Nuit dans les yeux, Gallimard

Les foulards bleus

La Petite Rue Claire et Nette, roman édité à l'École des Loisirs

édito & sommaire 81 * début Deutsch

 

 

 

Plaisir de lire...

 Y a-t-il des plaisirs différents de lecture? Y a-t-il une typologie possible de ces plaisirs? Il me semble qu'il y a, en tout cas et au moins, trois types du plaisir de lire, ou pour être plus précis: trois voies par lesquelles l'Image de lecture peut capturer le sujet lisant.

Selon le premier mode, le lecteur a avec le texte un rapport fétichiste: il prend plaisir aux mots, à certains mots, à certains arrangements de mots [...]. Ce serait là un type de lecture métaphorique ou poétique; pour goûter ce plaisir, est-il besoin d'une longue culture langagière? [...]

Selon le second mode [...], le lecteur est en quelque sorte tiré en avant le long du livre, par une force qui est toujours plus ou moins déguisée, de l'ordre du suspense: le livre s'abolit peu à peu et c'est dans cette usure impatiente, emportée, qu'est la jouissance; il s'agit là, bien entendu, principalement du plaisir métonymique de toute narration [...].

Enfin, il y a une troisième aventure de la lecture (j'appelle aventure la façon dont le plaisir vient au lecteur): c'est, si l'on peut dire, celle de l'Écriture: la lecture est conductrice du Désir d'écrire [...]. Ce n'est pas du tout que nous désirions forcément écrire comme l'auteur dont la lecture nous plaît; ce que nous désirons, c'est seulement le désir que le scripteur a eu d'écrire. [...] Dans cette perspective, la lecture est véritablement une production.

Roland BARTHES, Le français aujourd'hui, n° 32 (janvier 1976), pp. 15-16.


édito & sommaire 81

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