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SOMMAIRE 

numéros parus depuis 1990

 

Numéro  124 - Mars 2006

Sommaire

 

Pierre Brunson, 
Le combat contre la pieuvre
(V. Hugo, Les travailleurs de la mer), 1er & 2e degrés 

 

Jules Bradfer, 
Dans les médias,
Portraits brefs de gens  en place: documents bruts et propositions pour lire/écrire, 2e & 3e degrés 

 

Marc Devresse, 
Un scénario pour maîtriser l'accord du participe passé
, de la 1re à la 6e

 

Jean-Luc Léonard, 
Explorer - pratiquer le texte informatif
, 1er degré

 

En guise d'éditorial

Correcteur ou lecteur?

Certaines pratiques scolaires de l'écriture contribuent à sédimenter chez l'élève la conviction qu'à l'école écrire se réduit à faire des phrases sans faire de fautes et à construire un texte selon les règles. Or, écrire, c'est d'abord mettre au travail un contenu symbolique inséparable d'une forme sémiotique pour agir dans une situation. (...) Considérer la dimension symbolique de l'activité du sujet-écrivant, c'est prendre à la lettre une conception du langage qui refuse de séparer forme et contenu, qui refuse de séparer pensée-langage-sujet. (...)

Or, habituellement, le seul regard que le professeur pose sur la copie est celui du correcteur sur des épreuves d'imprimerie, et non celui d'un lecteur à l'écoute d'un auteur. 

D. Bucheton & J.-C. Chabanne, Parler et écrire pour penser, apprendre et se construire, PUF, 2002, pp. 34-35  

 

 

Le combat contre la pieuvre

dans le roman de Victor HUGO, Les travailleurs de la mer, 1866.  

Premier et deuxième degrés (expérience réalisée en classe de deuxième) * Récit: Pierre Brunson, ISM, Arlon

 Place de l'extrait dans l'oeuvre * Analyse et lecture expressive * Ecrits d'élèves à la manière de... * Proposition pour le 2e degré

Texte et pagination d’après FRANTEXT (http://atilf.atilf.fr/frantext.htm et GALLICA (http://visualiseur.bnf.fr/CadresFenetre?O=NUMM-88639&M=tdm&Y=Texte)

A partir de la page 367, sous le titre Les doubles-fonds de l’obstacle, trois sous-titres

1.   Qui a faim n’est pas le seul : de la page 367 à la page 370 en bas.

      (la rencontre de la pieuvre commence vers le bas de la page 369: Tout à coup il se sentit saisr le bras...)

2.   Le monstre : de la page 371 au bas de la page 376

      (c’est la longue description de la pieuvre)

3.   Autre forme du combat dans le gouffre : de la page 377 au bas de la page 379

      (c’est la reprise et la fin du combat)  

 

Situer l'extrait

L'ensemble du récit:

L'armateur Lethierry promet la main de sa fille Déruchette à qui pourra ramener le moteur de son bateau, La Durande, échoué au fond de la mer. Amoureux de cette fille, Giliatt va tenter l'exploit. Mais combien d'obstacles sur ce parcours! Parmi ceux-ci, le célèbre combat contre la pieuvre.

Le contexte immédiat:

[Page 367] Puis il [Gilliat] pensa à manger. (...) Il profita de ce que la mer baissait pour rôder dans les rochers à la recherche de langoustes. (...) 

[Page 369: Gilliat croit avoir repéré un crabe] (...) il remarqua, au-dessus du niveau du niveau de l'eau, à portée de sa main, une fissure horizontale dans le granit. Le crabe était probablement là. Il y plongea le poing le plus avant qu'il put, et se mit à tâtonner dans ce trou de ténèbres. 

 

[Ici commence l'extrait analysé en classe: mais son titre - le combat contre la pieuvre - sera masqué, de quoi créer chez mes lecteurs le suspense, l'attente curieuse!]

 

début pieuvre * sommaire/édito 124

Analyse et lecture expressive

 

[1]    Tout à coup il se sentit saisir le bras.

[2]    Ce qu’il éprouva en ce moment, c’est l’horreur indescriptible.

[3]    Quelque chose qui était mince, âpre, plat, glacé, gluant et vivant venait de se tordre dans l’ombre autour de son bras nu. Cela lui montait vers la poitrine. C’était la pression d’une courroie et la poussée d’une vrille. En moins d’une seconde, on ne sait quelle spirale lui avait envahi le poignet et le coude et touchait l’épaule. La pointe fouillait sous son  aisselle.

 

1. La rencontre d'une force inconnue et redoutable

 

Deux adverbes marquant la "soudaineté", le "saisissement" ponctuent le récit avant le combat proprement dit: tout à coup [§1],  brusquement [§12]  (la menace d'abord non identifiée, puis reconnue [à sa partie centrale: Giliatt reconnut la pieuvre [§15]

 

quelque chose, dans l'ombre, cela (...) on ne sait quelle spirale [3], pressions obscures [§11]...:

termes vagues: l'animal n'est encore identifié. 

 

[4]    Gilliatt se rejeta en arrière, mais put à peine remuer. Il était comme cloué. De sa main gauche restée libre il prit son couteau qu’il avait entre

  p370

les dents, et de cette main, tenant le couteau, s’arc-bouta au rocher, avec un effort désespéré pour retirer son bras. Il ne réussit qu’à inquiéter un peu la ligature, qui se resserra. Elle était souple comme le cuir, solide comme l’acier, froide comme la nuit.
[5]    Une deuxième lanière, étroite et aiguë, sortit de la crevasse du roc. C’était comme une langue hors d’une gueule. Elle lécha épouvantablement le torse nu de Gilliatt, et tout à coup s’allongeant, démesurée et fine, elle s’appliqua sur sa peau et lui entoura tout le corps.

[6]    En même temps une souffrance inouïe, comparable à rien, soulevait les muscles crispés de Gilliatt. Il sentait dans sa peau des enfoncements ronds, horribles. Il lui semblait que d’innombrables lèvres, collées à sa chair, cherchaient à lui boire le sang. 

[7]     Une troisième lanière ondoya hors du rocher, tâta Gilliatt, et lui fouetta les côtes comme une corde. Elle s’y fixa.

[8]    L’angoisse, à son paroxysme, est muette. Gilliatt ne jetait pas un cri. Il y avait assez de jour pour qu’il pût voir les repoussantes formes appliquées sur lui. Une quatrième ligature, celle-ci rapide comme une flèche, lui sauta autour du ventre et s’y enroula.

De même pour ligature, lanières, cordes...: 

des mots empruntés au langage de l'expérience commune (de la forme, du mouvement) qui ne sont pas du registre 'scienfitique"

 

 

 

La curiosité reste en alerte; la bête n'est identifiée que lorsque son centre apparaît [§ 13], alors que Giliatt est déjà garrotté.

 

mince, âpre, plat, glacé, gluant... * pointe, poussée, enfoncements... * lécha, entoura...:

adjectifs, noms et verbes pour l'impression 'tactile' d'un contact de plus en plus étroit avec le monstre

 

 

Rechercher d'autres termes produisant cette impression de contact insupportable

 

 

[9]    Impossible de couper ni d’arracher ces courroies visqueuses qui adhéraient étroitement au corps de Gilliatt et par quantité de points. Chacun de ces points était un foyer d’affreuse et bizarre douleur. C’était ce qu’on éprouverait si l’on se sentait avalé à la fois par une foule de bouches trop petites.

[10]    Un cinquième allongement jaillit du trou. Il se superposa aux autres et vint se replier sur le diaphragme de Gilliatt. La compression s’ajoutait à l’anxiété ; Gilliatt pouvait à peine respirer. 

[11]    Ces lanières, pointues à leur extrémité, allaient s’élargissant comme des lames d’épée vers la poignée. Toutes les cinq appartenaient évidemment au même centre. Elles marchaient et rampaient sur Gilliatt. Il sentait se déplacer ces pressions obscures qui lui semblaient être des bouches.  

 

deuxième (lanière) [§5], troisième (lanière) [§6], quatrième (ligature) [§8], cinquième (allongement)  [§10]: l'énumération est mise en évidence par la place de ces termes chaque fois en début de phrase

 

 

 

[12]    Brusquement une large viscosité ronde et plate sortit de dessous la crevasse. C’était le centre ; les cinq lanières s’y rattachaient comme des rayons à un moyeu ; on distinguait au côté opposé de ce disque immonde le commencement de trois autres tentacules, restés sous l’enfoncement du rocher.

[13]    Au milieu de cette viscosité il y avait deux yeux qui regardaient.

[14]    Ces yeux voyaient Gilliatt.

[15]    Gilliatt reconnut la pieuvre.  

 

viscosité (§12, 13, 48), immonde (§12): à l'idée de force irrésistible s'ajoute maintenant celle de répugnance

 

§§13 à 15: trois phrases-paragraphes nettement plus brèves que les §§ qui précèdent: l'information en est d'autant plus intense.  

 

deux yeux qui regardaient: un verbe à sujet habituellement animé, surtout humain. D'où le sentiment d'une présence vivante, comme consciente. Un regard à prendre presque comme un défi.

(...)    [le monstre: 371-376, description de l'animal]

Un objectif pour le deuxième degré:

sommaire édito 124 * début pieuvre

2. La description de l'ennemi

 

[Le monstre est identifié! V. Hugo le décrit longuement  - plus de 6 pages ! Le combat va avoir lieu.]

 

Montrer la pieuvre (images, plus deux vidéos, et excellentes notices) : http://www.dinosoria.com/pieuvre.htm 

Apprendre à comparer deux formes de la description:

* dans un texte de fiction 

 * dans un texte scientifique. (v. p. ex. les notices sur la pieuvre dans http://www.dinosoria.com/pieuvre.htm

Quelques orientations: les choix lexicaux, l'instance de l'auteur, la construction (l'ordre de succession des informations)

 

 

 

377

        [autre forme du combat dans le gouffre]

[16]    Tel était l’être auquel, depuis quelques instants, Gilliatt appartenait.

[17]    Ce monstre était l’habitant de cette grotte. Il était l’effrayant génie du lieu. Sorte de sombre démon de l’eau.

[18]    Toutes ces magnificences avaient pour centre l’horreur.

[19]    Le mois d’auparavant, le jour où pour la première fois Gilliatt avait pénétré dans la grotte, la noirceur ayant un contour, entrevue par lui dans les plissements de l’eau secrète, c’était cette pieuvre.

Elle était là chez elle.

[20]    Quand Gilliatt, entrant pour la seconde fois dans cette cave à la poursuite du crabe, avait aperçu la crevasse où il avait pensé que le crabe se réfugiait, la pieuvre était dans ce trou, au guet.

[21]    Se figure-t-on cette attente ?

[22]    Pas un oiseau n’oserait couver, pas un oeuf n’oserait éclore, pas une fleur n’oserait s’ouvrir, pas un sein n’oserait allaiter, pas un coeur n’oserait aimer, pas un esprit n’oserait s’envoler, si l’on songeait aux sinistres patiences embusquées dans l’abîme.

[23]    Gilliatt avait enfoncé son bras dans le trou ; la pieuvre l’avait happé.

[24]    Elle le tenait.

[25]    Il était la mouche de cette araignée.

[26]    Gilliatt était dans l’eau jusqu’à la ceinture, les pieds crispés sur la rondeur des galets glissants, le bras droit étreint et assujetti par les enroulements plats des courroies de la pieuvre, et le torse disparaissant presque sous les replis et les croisements de ce bandage horrible.

 

 

 

3. Le dénouement du combat

 

 

 

Du § 16 au § 29, insistance sur l'idée que Giliatt est vraiment à la merci de l'adversaire: 

 

 

 

 

 

 

 

appartenait (§16), 

elle était là chez elle (§19), 

happé (§23), 

il était la mouche de cette araignée (§25)

bandage (§26)

enchaînait (§27),

serré dans un poing démesuré (§28),

resserrer (§29) 

constriction (§30)]

 

 

[27]    Des huit bras de la pieuvre, trois adhéraient à la roche, cinq adhéraient à Gilliatt. De cette façon, cramponnée d’un côté au granit, de l’autre à l’homme, elle enchaînait Gilliatt au rocher.

Gilliatt avait sur lui deux cent cinquante suçoirs.

[28]    Complication d’angoisse et de dégoût. être serré dans un poing démesuré dont les doigts élastiques, longs de près d’un mètre, sont intérieurement pleins de pustules vivantes qui vous fouillent la chair.  

[29]    Nous l’avons dit, on ne s’arrache pas à la pieuvre. Si on l’essaie, on est plus sûrement lié. Elle ne fait que se resserrer davantage. Son effort croît en raison du vôtre. Plus de secousse produit plus de constriction.

Comparer ces termes indiquant la nette supériorité à ceux qui décriront, dans le dénouement, l'état de la pieuvre vaincue: 

 

un linge qui se détache, 

un haillon, 

deux tas gélatineux informes.... (§§ 50 et 51)

 

 

 

 

début pieuvre * sommaire/édito 124

p378

[30]    Gilliatt n’avait qu’une ressource, son couteau.

[31]    Il n’avait de libre que la main gauche, mais on sait qu’il en usait puissamment. On aurait pu dire de lui qu’il avait deux mains droites.

[32]    Son couteau, ouvert, était dans cette main. On ne coupe pas les antennes de la pieuvre ; c’est un cuir impossible à trancher, il glisse sous la lame ; d’ailleurs la superposition est telle qu’une entaille à ces lanières entamerait votre chair.

[33]    Le poulpe est formidable ; pourtant il y a une manière de s’en servir. Les pêcheurs de Serk la connaissent ; qui les a vus exécuter en mer de certains mouvements brusques, le sait. Les marsouins la connaissent aussi ; ils ont une façon de mordre la sèche qui lui coupe la tête. De là tous ces calmars, toutes ces sèches et tous ces poulpes sans tête qu’on rencontre au large.

[34]    Le poulpe, en effet, n’est vulnérable qu’à la tête.

[35]    Gilliatt ne l’ignorait point.

[36]    Il n’avait jamais vu de pieuvre de cette dimension.

[37]    Du premier coup, il se trouvait pris par la grande espèce. Un autre se fût troublé.

[38]    Pour la pieuvre comme pour le taureau il y a un moment qu’il faut saisir ; c’est l’instant où le taureau baisse le cou, c’est l’instant où la pieuvre avance la tête ; instant rapide. Qui manque ce joint est perdu.

[39]    Tout ce que nous venons de dire n’avait duré que quelques minutes. Gilliatt pourtant sentait croître la succion des deux cent cinquante ventouses.

[40]    La pieuvre est traître. Elle tâche de stupéfier d’abord sa proie. Elle saisit, puis attend le plus qu’elle peut.

[41]    Gilliatt tenait son couteau. Les succions augmentaient. Il regardait la pieuvre, qui le regardait.

[42]    Tout à coup la bête détacha du rocher sa sixième antenne, et, la lançant sur Gilliatt, tâcha de lui saisir le bras gauche.

[43]    En même temps elle avança vivement la tête. Une seconde de plus, sa bouche anus s’appliquait sur la poitrine de Gilliatt. Gilliatt, saigné au flanc, et les deux bras garrottés, était mort.

[44]    Mais Gilliatt veillait. Guetté, il guettait.

[45]    Il évita l’antenne, et, au moment où la bête allait mordre sa poitrine, son poing armé s’abattit sur la bête.

[46]    Il y eut deux convulsions en sens inverse, celle de la pieuvre et celle de Gilliatt.

[47]    Ce fut comme la lutte de deux éclairs.

[48]    Gilliatt plongea la pointe de son couteau dans la viscosité plate, et, d’un mouvement giratoire pareil à la torsion d’un coup de fouet, faisant un cercle autour des deux yeux, il arracha la tête comme on arrache une dent.

 

 

Giliatt finira par l'emporter grâce à: 

 

 

la ressource de son couteau, 

 

 

une main gauche forte comme "deux mains droites",

 

 

sa connaissance de l'ennemi

 (§38: il sait quel est "le moment qu'il faut saisir"; 

§ 34: "le poulpe n'est vulnérable qu'à la tête") 

 

 

et surtout son savoir-faire, l'habileté et la précision du geste décisif: 

 

[§48: d’un mouvement giratoire (...) il arracha la tête comme on arrache une dent)].

 

 

 

 

 

Bref, des atouts présentés en ordre croissant de qualité: 

 

* l'outil,

 

* la force physique

 

* la maîtrise de soi 

 

(§37: "un autre se fût troublé"), 

 

mise en valeur par un raccourci saisissant: § 44: "Guetté, il guettait", opposition passif / actif, dominé / dominant. 

 

 

* le savoir, 

 

* le savoir-faire.

 

p379

[49]    Ce fut fini.

[50]    Toute la bête tomba.

Cela ressembla à un linge qui se détache. La pompe aspirante détruite, le vide se défit. Les quatre cents ventouses lâchèrent à la fois le rocher et l’homme. Ce haillon coula au fond de l’eau.

[51]    Gilliatt, haletant du combat, put apercevoir à ses pieds sur les galets deux tas gélatineux informes, la tête d’un côté, le reste de l’autre. Nous disons le reste, car on ne pourrait dire le corps.

[52]    Gilliatt toutefois, craignant quelque reprise convulsive de l’agonie, recula hors de la portée des tentacules.

[53]    Mais la bête était bien morte.

[54]    Gilliatt referma son couteau.

 

linge qui se détache

haillon

deux tas gélatineux informes: 

à comparer aux expressions du début (du §16 au §29) pour décrire la force impressionnante de la pieuvre!

Cette fois, c'est la pieuvre qui est à la merci de Giliatt.

retour au début de l'analyse * sommaire et édito 124

   La lecture expressive 

qui suit l'analyse permet à l'élève-lecteur de rendre compte de sa compréhension du récit (exprimer l'étrange, l'horreur, l'énormité de l'obstacle, la force et l'adresse du marin combattant); le professeur propose à l'auditoire des condisciples d'ajuster au besoin la théâtralité de la lecture par le ton ou l'intensité de la voix, par le rythme, voire par la mimique et la gestuelle. 

(Ce débat entre pairs est une forme - toujours efficace - d'interévaluation.)

début pieuvre * sommaire/édito 124

Écrire à la manière de...

Chacun est invité à écrire un texte d'une quinzaine de lignes, où il mettra en avant les perceptions sonores, visuelles, tactiles... dans le récit d'une expérience vécue ou d'une aventure imaginaire, par exemple: 

Une marche nocturne au cours d'un camp de jeunes en pleine nature

Un orage en montagne

Un raid dans la forêt amazonienne 

Observons l'essai de Florentin W.

Un orage en montagne

Tout à coup, j'entendis un bruit sourd qui [déclencha] provoqua en moi une peur indescriptible. Une pluie froide et violente se mit à tomber. Sans perdre une minute, je courus [pour] rejoindre le chalet. Un instant plus tard, je me rendis compte que mes parents et ma petite soeur ne m'avaient pas suivi; ils avaient disparu. J'étais seul, trempé, désorienté, effrayé. Le tonnerre grondait et résonnait, les éclairs zébraient le ciel. La foudre s'abattit sur une dizaine de conifères qui s'enflammèrent immédiatement. Le feu se propagea rapidement. La fumée m'aveuglait, m'étouffait. La panique s'emparait progressivement de moi quand j'aperçus un hélicoptère de l'armée. Pour signaler ma présence, je composai à l'aide de ma lampe de poche le code S.O.S. comme mon père me l'avait appris quelques jours auparavant. Les militaires me repérèrent et amorcèrent leur descente. Mais il était trop tard... Mes poumons brûlaient, ma gorge était sèche, je perdis connaissance.

Quand je rouvris les yeux, j'étais à l'hôpital et mes parents veillaient à côté de mon lit inconfortable.

Florentin 

Pour une lecture en classe...

Questions à l'auteur: Tu as écrit tout seul? "Oui, le temps d'une fourche" [c'est du belge: étude surveillée entre deux cours]. C'est du vécu? "Peut-être; mais ça me plaît d'imaginer!"

Nous observons:

* j'entendis, provoqua, se mit à... j'étais seul, grondait, résonnait... 

Passés simples et imparfaits combinés à bon escient 

(ou plus-que-parfaits)

* j'étais seul, trempé, désorienté, effrayé (...) il était trop tard, mes poumons brûlaient, ma gorge était sèche, je perdis connaissance 

Deux fois quatre informations en peu de mots: identifions le procédé grammatical!

 

(Florentin écrit l'un au-dessus de l'autre déclencha et provoqua; plus loin il met pour entre parenthèses)

Débat capital, entre enseignants: d'où vient le savoir-faire langagier de nos élèves?: 'gammes' répétées? théorie mémorisée? ou pratique personnelle de lecture - ou d'écoute - fréquente de récits d'auteurs?


 

Dans les médias: Portraits brefs de gens en place 

Documents bruts et propositions pour lire/écrire, 2e & 3e degrés 

De Ségolène Royal aux Bronzés de 2006, de George W. Bush à Elio Di Rupo...

Une galerie de 24 portraits * Sportives, sportifs * Artistes, écrivains * Politicien(ne)s * Petite boîte à outils pour des réécritures

Pourquoi choisir des portraits brefs? Pourquoi les avoir choisis dans les médias?

 

 

*     La première réponse - trop facile peut-être - est qu'un choix de textes brefs permet en peu de pages une galerie plus abondante et variée, de proposer un large corpus ouvert au libre choix de l'enseignant qui adaptera sa sélection au niveau et aux intérêts de ses élèves.

 

*    Plus sérieusement, le genre particulier du portrait bref nous intéresse parce que la concision y va le plus souvent de pair avec la densité de l'information; il tient du croquis où quelques traits suffisent pour exprimer l'essentiel d'un personnage. 

 

*    C'est particulièrement vrai dans les médias - presse, radio, télévision - où le portrait sert au mieux leur intention de retenir l'intérêt du lecteur-auditeur-spectateur, de le séduire, de lui proposer - ou imposer... - un certain regard, un certain jugement sur l'événement, sur les acteurs de l'événement. Par sa concision, le portrait bref peut cerner l'essentiel...; il peut aussi - d'un "trait"  - préférer l'apparence à la réalité du personnage, ou même déconsidérer celui-ci (le trait peut alors être une flèche empoisonnée). Bref, le portrait bref est un lieu idéologique!

Notre galerie 

Elio Di Rupo, PS, Louis Michel, MR, Belgique

Daniel Constantini, entraîneur de l'équipe de France de handball Elio Di Rupo, PS, Belgique [bis]
Frank Vandenbroucke, coureur cycliste Pierre Perret, chanteur et poète Yahya al-Bishri, couturier saoudien
Tony Blair, premier ministre UK Yves Leterme, président du parti flamand CD&V Alain Van der Biest, PS, Belgique
Justin Gatlin, recordman du 100m Alain Robbe-Grillet, écrivain Paco Rabanne, couturier et gourou
Mario Cipollini et Alessandro Petacchi, coureurs cyclistes Louis Michel, commissaire européen [bis] Bernard Kouchner, PS, France
Fabien Barthez, gardien de but de football Ségolène Royal Pierluigi Collini, arbitre de football
Murielle Sarkany, championne du monde d'escalade en salle Baltasar Gracian, jésuite et écrivain, 17e siècle Les Bronzés de 2006
Lionel Jospin, PS, France  Georges W. Bush, président des USA  Marco Pantani, coureur cycliste

début portraits

Sportives et sportifs

Daniel Constantini, entraîneur de l'équipe de France de handball. 

Hommage lui est rendu dans le JT de 20 h, France 2, 31.01.2001

Oscar de la persévérance
César de l'humilité

Juxtaposition de groupes nominaux: effet de concision. 

Référence aux stars confirmées du cinéma avec de surcroît la rime intérieure. 

Mais D. C. ne 'fait pas la star': efficace, mais discret. Cela justifie l'éloge. 

 

Frank Van den Broucke, coureur cycliste, inculpé le 28.02.2002 pour détention de produits dopants

Titre et chapeau de l'article de Didier Malempré, dans L'Avenir du Luxembourg, 01.03.2002, p. 1 

La fin du Frank

Interpellé, interrogé, menotté, inculpé, licencié puis rendu à ses avocats et ses psychologues!

* Titre à double entente! Ce 1er mars 2002 à minuit, le franc belge cède définitivement la place à l'euro. Clin d'oeil au connaisseur!

* Juxtaposition de six participes passés, comme en rafale.

* Avocats & psychologues... l'intéressé est livré à la justice et à la psychiatrie.


Marco Pantani, coureur cycliste

Ancien coureur cycliste, vainqueur du Giro, du Tour de France, impliqué naguère dans une affaire de dopage... Trouvé mort le 14.02.2004 dans un hôtel à Rimini. Titre surplombant le grande photo du coureur, dans La Libre Belgique, du 16.02.2004, p. 1.

Marco Pantani
Rose, jaune, noir    

Hommage funèbre, sous forme de biographie-portrait par juxtaposition de trois adjectifs de couleur: deux victoires puis la drogue fatale. Triste drapeau sur la dépouille! 


Mario Cipollini et Alessandro Petacchi, coureurs cyclistes 

Manuel Jousse, au journal parlé de 13h du 08.07.2004, commente l'abandon de ces deux coureurs au Tour de France. 

On raye les noms de deux ténors italiens non partants: Mario Cipollini et Alessandro Petacchi, l'ancien et le moderne, l'égoïste et l'altruiste, l'excentrique et le timide.  Un diptyque: quatre groupe nominaux  juxtaposés et de même structure ("N et N"), trois couples d'antonymes. Grammaire et lexique mis à profit pour distinguer les deux sportifs

 

Fabien Barthez, gardien de but de football
Il est accueilli par des sifflets avant le match Lille-Marseille. Quelques jours auparavant, il a craché sur l'arbitre de nationalité marocaine. Commentaire d'un journaliste de FR2 au JT de 13h du 24.04.2005:

Imperturbable sous les sifflets: du Barthez tout craché!

Le comportement du sportif est mis en relief par détachement de imperturbable... puis par l'allusion finale où se conjuguent sens propre et sens figuré 

 

Justin Gatlin, recordman du 100m
 Recordman du 100m en 2005 (Rome en juillet, Helsinki, en août), il cultive son image... un peu à prix d'argent et de combines! Surtitre et titre d'un article d'Alain Léauthier (connaisseur en affaires judiciaires) dans Libération du 24.09.2005:

Justin Gatlin, 23 ans, américain. Le sprinteur le plus rapide des derniers championnats du monde court après la gloire et, un peu, après l'argent.
T'as pas 100 mètres?

Portrait élogieux, sauf en fin de... piste, par l'astuce d'un litote (un peu...)d'un zeugma qui associe défendable et indéfendable. 

 

Pierluigi Collini, arbitre italien

Il met un terme à sa carrière. Evocation par Jean-Claude MATGEN, La Libre Belgique, 20.06.2005, p.19. Titre: 

Pierluigi Collini, le divin chauve, a rangé son sifflet d'or         Divin... sifflet d'or: deux hyperboles pour célébrer ce maître des stades. "sifflet d'or" évoque la "valeur" de l'arbitre... peut-être aussi de sa fortune. Insinuation?

           
Murielle Sarkany, Belge, championne du monde d'escalade en salle
RTBF, JT de 19h30, 21.11.2001.

On l'appelle l'Eddy Merckx de l'escalade en salle     Cette structure est fréquente  (le Mozart du rap, le Breughel du graffiti, la Callas du fado, l'Archimède de la physique quantique...), dans l'éloge comme dans la dérision.

début portraits * sommaire et édito 124


Artistes, écrivains

Pierre Perret, chanteur et poète

Gilles TOUSSAINT, dans La Libre Belgique du 02.01.2003, p. 33 (c'est la légende sous la photo de l'artiste):            

Chanteur bien sûr, mais aussi ajusteur de belles lettres, rémouleur d'adjectifs et... simplificateur de formulaires administratifs.    

Equiivalence de son - 4 rimes en -eur -  et de sens - 4 métiers: Pierre Perret excelle dans chacun. 

(L'intéressé fait partie d'un groupe chargé de simplifier les formulaires administratifs.).

 

Alain Robbe-Grillet élu le 25.03.2004 à l'Académie française, au fauteuil de Maurice Rheims. 

Jérôme GARCIN, dans Le Nouvel Observateur du 15.04.2004, commente l'événement. Début de l'article

Ainsi donc, Alain Robbe-Grillet, dont la femme, Jeanne de Berg, auteur de romans sadomasos, aime tant à se travestir, a-t-il décidé, sur le tard et à son tour, de se déguiser en académicien français. Le masque et les plumes: voici un couple qui, même le jour du carnaval, ne passera pas inaperçu sur le Pont des Arts.

Le journaliste, excellent critique littéraire, joue avec le champ lexical du 'paraître': se travestir, se déguiser, masque, plumes, ne pas passer inaperçu; remaniant au passage le nom de son émission Le masque et la plume, sur France Inter

Il faut savoir que cet écrivain répugne à être reçu dans ladite Académie, à porter un habit vert qu'il trouve ridicule, à écrire un discours de réception - lui qui préférerait l'improviser. La presse ne manquera pas de brocarder les caprices de l'octogénaire. 

Yahya al-Bishri, couturier saoudien

Christophe AYAD, dans Libération, 23.02.2005. Surtitre et titre.

Yahya al-Bishri, 42 ans, couturier saoudien. Peu prophète en son pays, il détourne les tenues traditionnelles avec un style kitsch, sexy et orientaliste.
Chic pétrolier
Le mot prophète (mis en évidence par antéposition) : sa résonance particulière dans la culture musulmane, et aussi son sens courant: 'créatif', 'non conforme' (détourne les tenues traditionnelles..., sexy...) Donc il surprend! D'où le jeu allusif  du mot chic (voisin de choc, évoquant la crise survenue vers 1970: beau clin d'oeil au connaisseur!


Baltasar Gracian, jésuite et écrivain, 17e siècle
Philippe SOLLERS, dans Le Nouvel Observateur, 03.11.2005, présente cet écrivain espagnol (1601-1658) et son livre qui vient d'être réédité (
Traités politiques, esthétiques, éthiques, trad. introd. et annot. Benito Pelegrin, Paris, Seuil, 2005.) Titre de l'article. Extrait.

Sacré Jésuite. 

[Jamais l'espagnol, comme langue, n'est allé jusqu'à une telle splendeur.] Concentration, concision, multiplicité des points de vue, intelligence, spirales, renversements, voltes, tout se passe comme si Dieu, qu'on a voulu cadrer, simplifier, asservir, canaliser, et, en somme, embourgeoiser, ressurgissait dans sa dimension insaisissable, incompréhensible, libre, infinie, aristocratique.

Jeu d'accumulation: 7 noms sujets, 5 verbes (compléments de a voulu), 5 épithètes de dimension. Serait-ce un pastiche du style de Gracian? Portrait d'un écrivain à travers le portrait (et l'imitation?) d'une écriture.          


Les Bronzés * Janvier 2006, sortie de leur nouveau film, Les bronzés sont de retour,
avec Jugnot, Clavier, Chazel, Lhermitte, Balasko et Blanc. François Forestier, dans Le Nouvel Observateur du 26.01.2006, présente le film. Titre. Début de l'article.

La bombe à comique

Ah, les cons ! Ils sont pires qu'avant : mous du bide, va-de-la-gueule, bêtes comme des valises sans poignées.

Commutation [atomique / à comique]: procédé fréquent dans le titre satirique [v. supra chic pétrolier] De comique à cons, il y a parenté de graphie et de sens. Choix d'un lexique familier, de l'oral populaire:  cons, bide, gueule, bêtes comme... 

.
Paco Rabanne
, couturier et gourou.

[A propos de la prédiction de fin du monde lors de l'éclipse du 11.08.99 par ce célèbre "couturier métal"] Patrice LESTROHAN, dans Le Canard enchaîné 11.08.99, p. 7. Titre. Sous-Titre (lignes 2 et suivantes):. 

Paco Rabanne: le messie à métaux
Le couturier adepte du métal
Le messianique couturier métallurgique
Notre mage du prêt-à-prédire
Habilleur barbarellien de Bardot, Birkin et Jane Fonda
Le couturier illuminé
Notre Nostra-Abuse
Sept périphrases en cascade pour épingler la prétention du gourou (mage, illuminé, messie, messianique) et le goût (douteux?) du couturier (métal, métaux, métallurgique). Jeu néologique (messie à métaux, prêt-à-prédire, barbarellien, Nostra-Abuse), avec allusion à des personnages réels ou fictifs (Barbarella, Nostradamus, Docteur Mabuse).  

  

début portraits * sommaire et édito 124

Ces gens de la politique et du pouvoir     

 

Elio Di Rupo, PS, et Louis Michel, MR, Belgique

Catherine ERNENS, dans L'Avenir du Luxembourg, 19.05.2004, p. 2. Surtitre. Titre

Duel en Wallonie * Di Rupo-Michel
Pipe en bois contre noeud pap' en soie     
Bientôt les élections. Deux ténors s'opposent, croqués par deux périphrases avec similitude de structure et de rime [wa], plus l'allitération [5 labiales]. Le portrait ne cerne que l'apparence: insinue-t-on par là que celle-ci l'emporte sur le fond? Plaire ou convaincre?

 

Elio Di Rupo [bis], Président du PS. Fernand LETIST, dans Le Soir, 06.09.2003, p. 39. Début du chapeau de l'article: 

Elio Di Rupo est très internet, plutôt presse écrite et un peu télé.      

Dégradé de 3 adverbes dans une structure de plus en plus à la mode: adverbe + nom (style branché). Ici encore, se questionner sur la figuration en politique. 

 

Louis Michel [bis], commissaire européen, La Libre Belgique du 13.09.2004, p. 11, lui consacre deux pages signées Paul Piret, sous le titre La politique coups de gueule. Chapeau de l'article:

Louis Michel, 57 ans depuis 10 jours, devient dès ce lundi commissaire européen en terminant le mandat de Philippe Busquin.
Evocation
d'un truculent,
d'un colérique,
d'un boulimique,
d'un omnipotent.     

Variation de forme - et de graphie - entre la première phrase et ce qui suit:: d'une information objective, officielle, on passe à un regard plus personnel du journaliste condensé en quatre adjectifs. Valeur de vérité de ce regard? La politique joue sur la séduction; la presse aussi!

 

Lionel Jospin, en perte de vitesse, à l'approche des législatives du printemps 2002. Article de Bernard Delattre dans        La Libre Belgique, 22.11.2001, p. 5. Légende de la photo de L. Jospin:

Défoncé par son bilan, défié par la police, sollicité par la justice. Triple allusion: bilan gouvernemental décevant, manifs répétées de policiers, citation en justice dans l'affaire Lestrade. Equivalence de structure (3 fois p. passé + gr. nominal), de champ lexical (idée négative)


George W. Bush, Président des USA

*    Philippe PAQUET, La Libre Belgique, 12.03.2003, p. 1.[Sous la photo de Georges W. Bush, brève présentation du personnage, annonce des articles en pages intérieures:]

(...) nous nous sommes rendus dans ce Texas profond (...) pour mieux cerner cette personnalité façonnée par la Bible et par le pétrole (...)      

Le zeugma Bible-pétrole condense le fondamentalisme religieux (la 'Bible à la lettre', le rejet d'une lecture ouverte, le patriotisme coloré de religiosité), la domination d'un clan de magnats de l'or noir.

*    Divers médias, printemps 2001, évoquent l'opposition de George W. Bush, Président des U.S.A., au Traité de Kyoto pour la protection de l'environnement, par la périphrase suivante:

Le texan toxique 

Jeu sur le son (allitération [t] [k]) et sur le sens:  appliquer à un humain un adjectif (d'ailleurs peu flatteur) appliqué d'ordinaire à un produit chimique. 

           

Ségolène Royal, PS, France: possible candidate à l'élection présidentielle de 2007.

[Titre à la une dans Le Canard enchaîné du 21.12.2005

Ségolène, la dame aux caméras       Désigné par le prénom, le personnage est perçu autrement. Réemploi d'un titre célébrissime, assorti d'une insinuation: la dame élégante comme 'celle aux camélias' mais devenue spectacle..

 

Tony Blair premier ministre, Gréande-Bretagne

Sa position après la guerre en Irak est analysée par Françoise Nice, au journal parlé de 13h de la RTBF, le 28.04.2003

Combatif, reposé, Tony Blair a l'allure d'un quinqua requinqué, écrit le Financial Times; il a passé le cap de la guerre, sa cote de popularité a remonté; mais on verra, jeudi, lors des élections locales et régionales, si les électeurs ne l'attendent pas sur le front intérieur.     

Cela bascule à partir de mais: passage de l'euphorie (santé, dynamisme, popularité) à la perspective d'un lendemain moins chantant. Du front de l'Irak au front intérieur. Combatif, certes, s'agissant de l'Irak, mais quid, bientôt, sur l'autre front?

La forme allitérative quinqua requinqué est habile mais déjà attestée dans Le temps (quotidien suisse) du 15 mai 1999 (article de Marie-Claude Martin sur Glaude Goupil, cinéaste, intitulé  :" Autoportraiot complaisant d'un quinqua requinqué. .

 

Yves Leterme, nouveau président du parti flamand CD&V

Paul PIRET le présente dans La Libre Belgique, 30.06.2003, p. 4. Article intitulé Un nouveau profil de ministrable

(...) Il n'a pas la truculence brute d'un Dehaene, la détermination froide d'un Van Rompuy, la brutalité maligne d'un Van den Brande, l'opiniâtreté besogneuse d'un Van Parys... Mais ce serait lui faire injure que de le décrire en creux.   Procédé courant dans le portrait politique: souligner les différences avec d'autres présidentiables. Quatre fois la même structure pour mieux cerner les contrastes. Le mot mais amorce plutôt l'éloge que le blâme ou la méfiance.


Alain Van der Biest, PS, Belgique

Bientôt le procès de l'assassinat du ministre socialiste André Cools, dont Alain Van Der Biest est soupçonné d'avoir été le commanditaire; celui-ci s'est suicidé... R. P., dans La Libre Belgique, 16.10.2003, p. 18. Article évoquant le disparu. Titre et chapeau.

L'intelligence et la bouteille
Brillant universitaire, brillant professeur, brillant politique, brillant écrivain. Et alcoolique. L'homme fort de Grâce-Hollogne s'est enfoncé lui-même.

L'oxymore du titre (valeur vs déchéance) est ensuite développé: l'éloge avec l'effet oratoire de la répétition de brillant; puis, brève, très brève, la défiguration! Et encore un oxymore final homme fort... enfoncé! [Grâce-Hollogne, commune de la périphérie liégeoise dont A. Van der Biest fut bourgmestre].

 
Bernard Kouchner, PS, France

Extrait de l'article d'Alain DUHAMEL intitulé Le paradoxe Kouchner, un allié-importun, paru dans Libération, 14.12.2005. 

Il est trop novateur pour être discipliné, trop téméraire pour savoir s'arrêter, trop populaire pour n'être pas personnel, trop passionné pour ne pas être susceptible et ombrageux, trop éloquent pour être prudent, trop admiré pour ne pas être narcissique.      Procédé grammatical efficace pour marquer - à six reprises - les contrastes de l'homme politique

       

début portraits * sommaire et édito 124

     

Petite boîte à outils pour des réécritures

 

Travailler sur la structure

Oscar de la persévérance
César de l'humilité

[D. Constantini]

Défoncé par son bilan, 

défié par la police, 

sollicité par la justice. 

[Jospin]

(...) ajusteur de belles lettres, 

rémouleur d'adjectifs

et... simplificateur de formulaires (...) [P. Perret]

L'ancien et le moderne, 

l'égoïste et l'altruiste, l'excentrique et le timide. 

[M. Cipollini et A. Petacchi]

* Recherchons d'autres portraits où des groupes de même moule syntaxique sont coordonnés ou juxtaposés (comme ci-dessus)

Travailler sur le sens, avec les outils du lexique

L'intelligence et la bouteille

[Van der Biest]

opposition: qualité vs défaut positif vs négatif

 

Interpellé, interrogé, menotté, inculpé, licencié 

[V. d. Broucke]

même champ lexical  ("rejet"...)

truculence..., détermination..., brutalité..., opiniâtreté... 

[Y. Leterme]

même champ lexical  ("qualité humaine")

façonné par la Bible et le pétrole [G. W. Bush]

zeugma: procédé à la fois lexical (2 domaines très différents) et syntaxique (groupes de même fonction)

 

Travailler sur le son et sur le rythme 

quinqua [T. Blair]

noeud pap' [E. Di Rupo]

Registre familier par l'apocope

Chic pétrolier [Yahya Al Bishri]

le masque et les plumes [Grillet]

Réécriture par commutation de phonème

le texan toxique

quinqua requinqué

Allitération (plusieurs fois le même phonème)

truculent/boulimique/colérique

l'intelligence / et la bouteille

Des groupes de même rythme (3x3, 2x4)

début portraits

Travailler sur le registre de parole: 

Réécrire sur un autre registre, par exemple, le portrait des Bronzés (Ah! les cons...

 

Employer certaines figures de style. Par exemple:

Pipe en bois contre noeud pap' en soie [Di Rupo, Louis Michel]

Métonymie: une partie pour le tout   

court après la gloire et après l'argent [Gatlin]

Zeugma: "attelage" de noms référant à des domaines différents (origine de ce mot?)

Oscar de la persévérance [D. Constantini]

Divin chauve [P. Collini]

Dans le contexte, cela tient de l'hyperbole, procédé fréquent dans le reportage sportif

Du Barthez tout craché (allusion et satire)

bêtes comme des valises sans poignées [Bronzés] comparaison (proche de la métaphore)

la dame aux caméras [S. Royal]

le masque et les plumes [A. Robbe-Grillet]

réécriture, pastiche, allusion...

Six propositions pour écrire

1/ Ou bien chacun choisit un personnage de l'actualité (acteur, cinéaste, sportif, homme politique...) censé être suffisamment connu des condisciples. - Ou bien on se met d'accord pour faire le portrait d'un même personnage.

2/ Dans le premier cas, l'auteur peut ne pas donner le nom de son personnage, mais proposer cependant assez d'indices pour le faire découvrir (préférer donc la nuance, l'allusion, à ce qui serait trop évident)

3/ Même satirique, le portrait ne peut tourner à l'insulte! Ici, encore: nuance et discrétion.

4/ L'écrit ne peut dépasser 60 mots: à titre indicatif, celui d'A. Robbe-Grillet en compte 60! Une prime à la brièveté. 

5/ Chacun lit son texte devant la classe. Celle-ci reconnaît ou non le personnage... Discussion: "c'est trop facile, c'est trop difficile d'identifier"! Et pourquoi. C'est là une démarche importante: l'analyse par des pairs!

6/ Chacun aura - au préalable - noté  avec précision les procédés d'expression (plusieurs procédés figurent dans la boîte à outils ci-dessus); et rendra compte à la classe de ces moyens d'expression. 

début portraits * sommaire et édito 124

 

 

Marc Devresse

 

Un scénario pour mieux maîtriser l'accord du participe passé

de la 1re à la 6e

 

État des connaissances * Cahier d'exercices * Identifier les participes passés * Organigramme: participe passé des v. pronominaux

 

Un article récent d’Isabelle Gauvin dans Enjeux aborde la problématique de l’accord du participe passé. L’auteur montre que les élèves Québécois ont une conception souvent erronée de ce type d’accord. Rien de bien différent chez nous, en Belgique. Tout enseignant est en effet confronté dans sa pratique quotidienne, au cours de ses corrections, aux multiples erreurs commises par les élèves. Ce n’est pas faute pourtant d’explications, de rappels ou d’exercices qu’ils auront reçus de manière répétée tout au long de leur cursus scolaire. Mais bon, le clou est là qu’on ne parvient décidément pas à enfoncer.

I. GAUVIN, « Conceptions d’élèves sur l’accord du participe passé au terme de la scolarité obligatoire », Enjeux, vol. 63, été 2005, pp. 97-115. 

 Comme tous, je connais cette situation, et d’autant plus que je côtoie ou ai côtoyé des élèves faibles appartenant notamment à des filières techniques et professionnelles. J’ai fini cependant par mettre au point un scénario susceptible, je l’espère, d’améliorer les performances des élèves. 

Isabelle Gauvin relève dans son article la nécessité – mais aussi la difficulté – de maîtriser différents types de connaissances : déclaratives, procédurales et conditionnelles. Rappelons brièvement avec Anne-Sophie Gobin que les connaissances déclaratives correspondent à la question « Quoi ?» et concernent des connaissances théoriques ou des connaissances de faits ; que les connaissances procédurales correspondent à la question « Comment ? » et concernent des séquences d’actions, et enfin que les connaissances conditionnelles correspondent aux questions « Quand ? » et « Pourquoi ? ». Traditionnellement, que fait-on ? Après avoir « expliqué », le professeur donne à l’élève la règle qu’il lui suffira d’appliquer quand le cas visé se présentera. Il vérifie par des exercices si l’élève applique correctement la règle. Autrement dit, on « travaille » les connaissances déclaratives et procédurales. Quand un exercice est réussi, on pense qu’un niveau de maîtrise est atteint. Mais plus tard, deux jours, ou deux semaines après, dans d’autres contextes, l’élève en situation de production commet à nouveau de nombreuses fautes d’accord. Les connaissances se sont évaporées. Pourquoi ? Parce que la troisième connaissance, la connaissance conditionnelle, n’a pas été travaillée. Sans elle, pas de réelle intégration. Il ne suffit pas que l’élève connaisse la règle et qu’il soit capable de l’appliquer : il faut d’abord qu’il reconnaisse une situation nécessitant la mobilisation de ces deux savoirs. Le scénario que j’ai imaginé essaie de répondre à cette nécessité.

A.-S. GOBIN, « Pistes pour une remédiation en orthographe dans l’enseignement secondaire », Enjeux, vol 62, printemps 2005, pp. 25-45.

Le scénario du parcours

 Voici ce qui est proposé aux élèves :

« Vous allez construire un cahier d’exercices portant sur l’accord du participe passé. Les exercices que vous aurez compilés seront administrés à un condisciple. Après avoir réalisé cet objet, vous commettrez beaucoup moins de fautes d’accord du participe passé qu’avant. ». Cette fois, ce sont donc les élèves qui vont créer les exercices, et cette perspective est assez motivante pour eux.  

début participe passé * sommaire/édito 124

Séquence 1

Un état des connaissances

Il me parait indispensable de commencer par un exercice « classique » comme celui-ci :

Accordez correctement le participe passé dans les phrases suivantes :

Les exercices que j’ai ..................... sont faciles (corriger).

 La correction permet de rappeler les règles. Etant entendu que je m’adresse à un public faible, je m’en tiens pour l’instant aux cas dits généraux (participe passé sans auxiliaire, avec être et avec avoir). Un exercice de « vérification » - dont j’ai indiqué les limites plus haut- clôture cette première séquence dont l’objectif est double : d’une part, il s’agit de réactiver des connaissances déclaratives et procédurales, d’autre part, il s’agit de préparer les élèves au travail qui va suivre. Pour motiver les élèves, il est utile de leur dire combien il est important de partir d’une bonne base commune pour réaliser tous de la même manière le cahier d’exercices.

 Une remarque encore : on le sait d’expérience (et l’enquête d’Isabelle Gauvin dans l’article cité le confirme) : c’est le cas du participe passé employé avec avoir et précédé d’un complément direct de verbe (CDV ou COD) qui fait le plus difficulté. Certains élèves ont de réels problèmes de compréhension de la règle et de son application. « Le pp employé avec avoir s’accorde en genre et en nombre avec le CDV s’il est placé avant. ». Mais quand l’élève lit :

Les exercices que j’ai corrig... sont difficiles

et qu’il cherche le CDV, il part de difficiles, remonte la chaine de mots pour chercher le CDV, et le trouve, mais... après (en quelque sorte !). Oui, certains élèves en sont là... J’ai pensé que pour ceux-là, il était utile de recourir à une visualisation de l’analyse et de l’application de la règle. Je leur présente donc une petite animation sous Power Point qui prépare aussi la séquence suivante. [Les élèves peuvent d’ailleurs compléter cette présentation en ajoutant d’autres exemples pris dans les exercices déjà réalisés en classe.]

 Séquence 2  

début participe passé * sommaire/édito 124

 Les élèves vont commencer à réaliser leur cahier d’exercices. 

Au préalable, je distribue à chaque élève un roman différent.

 Leur première tâche consiste à trouver des phrases comportant des participes passés et à faire une analyse en respectant la procédure expliquée dans le document « Participe passé – Processus d’identification – Cas généraux » qui leur est remis et qui est complété en classe : Les phrases exemples sont complétées en soulignant le participe passé, en entourant d’un  cercle l’auxiliaire et en reliant d’une flèche le participe et le mot qui commande son accord. Dans les consignes de cette tâche, figure le point 4 qui est essentiel : il est demandé aux élèves d’identifier chaque fois de manière précise quel cas ils ont rencontré. Comme on le constate, cinq cas peuvent se présenter (1, 2, 3.1, 3.2, et 3.3). Quand un élève a trouvé dix participe passés, les a analysés et identifiés, il remet son travail au professeur pour une validation. Je découvre encore de trop nombreuses erreurs, qui sont corrigées. Certains élèves confondent la nature des mots : certains adjectifs deviennent des participes passés. Quelques (re)mises au point s’avèrent nécessaires.

Avec vingt élèves, le professeur disposera donc de 200 participes passés.

C’est lors de cette séquence que les élèves travaillent la connaissance conditionnelle. On voit bien que souvent ils hésitent : « Tel mot est-il bien un participe passé ? Comment puis-je m’en assurer ? » Le professeur viendra en aide en circulant entre les bancs. On le voit, le scénario essaie d’intégrer de manière dynamique les trois connaissances.

Séquence 3. Mise en forme du cahier d’exercices.

Une fois corrigé et validé par le professeur, le document réalisé lors de la séquence précédente va être utilisé de la manière suivante :

L’élève recopie sur une autre feuille les phrase trouvées, sans analyse bien sûr, et en remplaçant le participe passé par l’infinitif correspondant :

Je demande, quand c’est possible, un encodage avec un traitement de texte, pour des raisons évidentes de propreté et d’exploitations postérieures. Un programme de base de données permettra aussi au professeur de constituer une banque de phrases permettant de générer des exercices.

Les efforts que nous avons ................... ont été stériles.            (faire)

 Ce travail effectué, les élèves peuvent s’échanger les exercices. L’autocorrection est possible avec la feuille d’analyse.

 Séquence 4

On peut augmenter la difficulté en faisant varier la recherche de phrases, par exemple en demandant aux élèves de ne chercher que des cas où le participe passé est utilisé avec le verbe avoir.

Appliquer le même scénario au cas des verbes pronominaux

J’ai imaginé une sorte d’organigramme (voir ci-dessous) qui guide l’élève dans son travail d’analyse et me permet lors d’exercices de vérifier si l’élève ne s’est pas trompé. Le principe est d’avancer pas à pas en ne posant qu’une question à la fois et en partant du cas le plus facile.  

début participe passé * sommaire/édito 124

Participes passés - Procédure d’identification – Cas généraux

 Vous lisez un roman, peu importe lequel. 

  1. Vous identifiez un participe passé dans une phrase : vous recopiez cette phrase.
  2. Vous soulignez le participe passé.
  3. Vous entourez l’auxiliaire qui précède (s’il y en a un).
  4. Vous identifiez le cas par un numéro (voir liste).
  5. éventuellement vous reliez le participe au mot qui commande son accord.

Liste numérotée des cas généraux :

 Cas N° 1 :.  p.p. employé sans auxiliaire

Que l'on recueille les enfants abandonnés.  

Cas N° 2. :  participe passé conjugué avec être (à l'exception du cas particulier des verbes pronominaux). 

Vos raisons seront admises.  

Cas N°3.1. : p.p. conjugué avec avoir sans COD. 

Elles ont menti à Pierre. 

Cas N°3.2. : p.p. conjugué avec avoir et avec un COD derrière. 

Nous avons fait des efforts. J'avais prévu ses malheurs.  

Cas N°3.3 : p.p. conjugué avec avoir et un COD devant. 

Les efforts que nous avons faits ont été stériles.  

Remarque : pour trouver le COD, reprenez la partie de la phrase où se trouve le participe, commencez par le sujet, verbe, puis posez la question qui/quoi ?

Nous avons fait quoi ? des efforts

  début participe passé * sommaire/édito 124

 

Accord des verbes pronominaux

 

 

 

 

Le verbe existe-t-il sans pronom?                       

Accord avec le COD

Elle s'est levée tôt. 

Cette voiture, il se l'est procurée en Italie. 

Cas n° 3

Pas d'accord

Elle s'est acheté cette voiture en Italie

 

 

 

Cas n° 4

Pas d'accord

Les jours se sont succédé sans joie.

 

 

 

Cas n° 5

Accord avec le sujet

Elle s'est aperçue de son erreur.

 

 

 

Cas n° 6

 

Attention:

*    SE RIRE, SE PLAIRE, SE COMPLAIRE, SE COMPLAIRE ne s'accordent jamais.

*    Un conseil: pour trouver plus facilement le COD dans la phrase, remplacez être par avoir, et - alors seulement - posez la question QUI/QUOI.

début participe passé * sommaire/édito 124

 

 

 

 

Approche du texte informatif au 1er degré.

Récit de Jean-Luc Léonard, IND, Arlon   

référence correcte * survol * titres et questionnement * intertitres * paragraphes * conclusion et contact

Dans le cadre d'une séquence sur "le conte et le merveilleux", mes élèves ont été amenés à devoir exploiter un texte informatif à travers un dossier : Il était une fois… le conte dans le magazine Virgule, Ed. Faton, Dijon, n° 25, déc.2005, pp. 27-34

[Le magazine "Virgule" est un mensuel de français et de littérature pour les 10/15 ans. 5,50 €, abonnement : 53 € chez Tondeur Diffusion, Bruxelles. Email : press@tondeur.be, pour la Belgique. On le trouve également au numéro dans certaines librairies. Site Internet : http://www.vigule-mag.com ]

L'opportunité de "comment aborder un texte/document informatif" s'est donc présentée. Il fallait alors déterminer les différentes étapes qui permettent d'exploiter n'importe quel texte informatif (explicatif, descriptif).

 

Première étape : observer ou rédiger la référence correcte de l'article

Elle permet de déterminer la provenance, le public visé, la date, le sérieux des infos…

Ainsi, le mensuel "Virgule", qui vise un public jeune (les 10-15 ans) qui est attiré par ce qui touche le français et la littérature ne peut pas se permettre de donner des informations erronées. De plus, ses dossiers (et articles) sont très récents et doivent rester compréhensibles et intéressants pour le public visé. 

(Je tiens à signaler que je prends personnellement beaucoup de plaisir à lire tous les mois ce magazine et que, grâce à lui, j'apprends encore beaucoup de choses, même si j'ai 35 ans de plus que le public visé.)

début T informatif * sommaire & édito 124

Deuxième étape : le «SURVOL»

Avant de commencer à lire le texte, le "survol" permet de se faire une idée de l'article qu'on va/veut exploiter. Il consiste à repérer tous les éléments visuels :

-         le titre, surtitre, sous-titre, chapeau, intertitres

-         les paragraphes, la mise en colonnes (pourquoi des colonnes ?)

-         la typographie : polices différentes, gras, souligné, italique, taille, surlignement…

-         l'iconographie : photo, dessin, illustration, caricature… + les légendes

-         l'infographie : schéma, plan, carte…

-         les encadrés  (dans ou hors du texte)

-         les notes en bas de page

-         le nombre de pages

-        

Cette opération se fait généralement rapidement et mentalement mais quand on aborde le texte informatif, il est utile de demander aux élèves de repérer et de noter sur une feuille les différents éléments que l'on retrouve dans l'article à exploiter.

  Troisième étape : les titres et le questionnement.

  -         Lire les titres (surtitre, sous-titre et chapeau)

-         Se poser des questions (qui, quoi, quand, où, comment, pour quoi, pourquoi…).

-         Reprendre toutes les réponses aux questions et rédiger une phrase qui reprend les informations trouvées. (Il n'y a pas toujours une réponse à chaque question !)

Exemple tiré d'un autre dossier GAILLARD, R., Les sorcières dans magazine "Virgule", n° 12, oct. 2004, pp. 20-29  

début T informatif * sommaire & édito 124

   

Titre : Sorcières.

Chapeau : "Et les sorciers, alors ? Pourquoi parler ici de sorcières, et non de sorciers ? Parce que, traditionnellement, en Europe, la sorcellerie est avant tout une affaire de femmes. Entre la fin du Moyen Age et la fin du XVII° siècle, des milliers de personnes ont été accusées de pratiquer la sorcellerie et brûlées vives sur des bûchers. Parmi ces victimes, il y eut bien quelques hommes, mais très peu; presque toutes étaient des femmes."

Qui ? les sorcières (au féminin), des milliers de personnes

Quoi ? brûlées vives sur des bûchers

Quand ? fin du M-A à fin XVII° s.

? en Europe

Pourquoi ? pratiquer la sorcellerie

  Ø      "Des milliers de sorcières ont été brûlées vives en Europe, de la fin du Moyen Age à la fin du XVIIème siècle, pour avoir été accusées de pratiquer la sorcellerie."

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Quatrième étape : les intertitres

Il est intéressant de reprendre également les intertitres et de voir la progression des informations. Il faut néanmoins attirer l'attention sur le fait que, dans certains articles, les intertitres ne sont pas nécessairement des "titres de paragraphe" mais parfois des phrases tirées du texte qui servent d'accroche.

Intertitres du dossier "Sorcières !" :

(Introduction)

-         D'abord, il y eut les grandes magiciennes

-         Et puis Dieu créa la femme

-         Alors vint le temps des sages femmes

-         Et le diable transforma les sages femmes en sorcières

-         Deux siècles de chasse aux sorcières, c'est long

On peut remarquer la progression de ces intertitres en attirant l'attention sur les "indicateurs temporels" : d'abord, et puis, alors, et, deux siècles. Il serait intéressant de rechercher d'autres indicateurs temporels possibles : ensuite, après, enfin, à présent …

Ces indicateurs devront également être repérés lors de la lecture de l'article.

Intertitres du dossier "Le conte"

(Introduction)

-         Le jour où la fève a éclaté de rire

-         Un bon feu + un bon conte = une veillée réussie

-         Au château, on transforme les souillons en princesses

-         Les héros de Perrault ont la classe !

-         Au XVIII° siècle, le conte, c'est super tendance !

-         Avec les frères Grimm, retour aux sources du conte

-         Grève de taxi au XX° siècle : Cendrillon doit prendre le métro !

(On pourra constater, lors de l'exploitation, que l'on part du conte populaire pour parvenir au conte contemporain: observer l'évolution du conte.)

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Cinquième étape : les paragraphes (§)  

On peut, à présent, aborder la lecture proprement dite de l'article en procédant paragraphe par paragraphe.

Un paragraphe est une partie de texte séparée d'un autre paragraphe par un "interligne" plus important ou par un retour à la ligne avec ou sans alinéa. Un paragraphe bien construit est bâti autour d'une idée principale facile à retrouver car elle se situe normalement au début du §. Cette idée principale est alors suivie d'idées complémentaires ou secondaires qui ont pour fonction, selon les cas, de la développer, de la préciser, ou encore de l'illustrer par des exemples.

  Il faut alors continuer à repérer les informations qui répondent à nos questions (voir point 3ème étape), en surlignant les mots-clés : les mots les plus importants du texte, ceux qu'on ne peut pas supprimer, ainsi que les "organisateurs textuels."

  Ces organisateurs sont de deux types : les indicateurs temporels – dont nous avons déjà parlé – et les indicateurs ou organisateurs logiques.

Cette deuxième catégorie indique les relations entre les idées (dans un § ou entre les §).

Ces relations sont de l'ordre de :

-         l'addition (développer l'idée) : et, aussi, de même, de plus, également, quant à …

-         la précision ou l'illustration : ainsi, c'est-à-dire, citons, notamment, par exemple…

-         la conséquence : ainsi, aussi, c'est pourquoi, dès lors, donc, d'où, en conséquence…

-         la cause : car, parce que, puisque, comme, vu que …

-         l'opposition : cependant, mais, malheureusement, néanmoins, en revanche, pourtant, toutefois…

-         la conclusion : ainsi, donc, en définitive, en résumé, finalement, pour conclure…

-         la ponctuation (les ":" ) peut aussi annoncer un exemple ou une explication

 

Après avoir repris les informations qui répondent à nos questions, et repéré les mots-clés et les indicateurs textuels, il faut alors rédiger une phrase qui rassemble les différentes informations pour chaque paragraphe. 

  Ex. : (texte introductif tiré de : "Il était une fois… le conte")  

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"Il était une fois dans les contrées lointaines, et dans des temps si reculés que l'écriture n'existait pas encore, et que tous les récits se faisaient de manière orale, il était une fois, donc, le pays fabuleux des mythes : on se réunissait autour du totem, le plus souvent de forme animale, car c'était le temps prodigieux où les bêtes parlaient et écoutaient et pour lesquelles on récitait des paroles sacrées… Ainsi naissaient des mythes, c'est-à-dire des réponses, en forme de récits légendaires, aux questions pressantes que les hommes se posaient sur la Nature et ses mystères (et "mythe", ou muthos en grec, désigne la parole primitive, les premières histoires qui ont accompagné les premières interrogations des hommes). En effet, pourquoi le feu des volcans ? Que devient l'âme de l'animal sauvage, traqué à la chasse, quand sa chair a été cuite et dévorée ? Pourquoi la végétation meurt-elle en hiver pour renaître ensuite, au printemps, dans sa splendeur et sa gloire ? Pourquoi le nombre infini des étoiles accrochées à la voûte céleste ? Pourquoi la mort, et où vont les défunts après leur passage sur la terre ? A toutes ces questions souvent angoissantes, les mythes apportent des réponses. Ainsi par exemple, on raconte qu'un dieu aurait posé d'immenses candélabres sur la voûte du ciel, pour séparer la nuit de la lumière, et pour que le voyageur errant puisse trouver son chemin à travers les noires ténèbres : voilà pourquoi, depuis ce temps-là, il y a tant d'étoiles au-dessus de nos têtes."

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Questionnement !

-         Qui ? les hommes

-         Quand ? temps reculés, quand l'écriture n'existait pas, quand les récits étaient oraux

-         Quoi ? les mythes

-         Pourquoi ? répondre aux questions angoissantes des hommes

-         Pour qui ? les hommes

-         Comment ? par des récits légendaires

-         (Où ? dans des contrées lointaines)

  Ø      Dans des temps reculés, quand l'écriture n'existait pas et que les récits étaient oraux, les hommes inventaient (racontaient) des récits légendaires appelés "mythes" pour répondre aux questions angoissantes de l'homme. (= 3 lignes au lieu de 17)

 

On peut ainsi constater que les réponses au questionnement permettent ainsi de "rédiger" l'idée principale d'un paragraphe ou d'une partie, quelque peu perdue dans les exemples. Dans ce texte introductif, il n'y a pas de réelle présence d'indicateurs temporels ou logiques.

  Il s'agit alors de continuer la lecture § par § et de procéder à chaque fois de la même manière.

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Conclusions

  Aborder le texte informatif au 1er degré répond ainsi à un certain nombre de compétences reprises dans le programme. Je tiens à signaler mes propres constatations :

    -     L'élève peut ainsi orienter sa lecture pour distinguer l'essentiel de l'accessoire.

    -    Il apprend à rédiger les idées principales avec ses propres mots sans recopier des phrases du texte.

    -     Il commence à développer les techniques de la contraction et du résumé de texte abordées au 2ème degré.

    -     Il peut aussi confronter ses propres "réactions/rédactions" avec celles de ses condisciples et à celle de son prof. On peut alors parler d'argumentation.

        -    Il intègre aussi petit à petit des "techniques" (des réflexes) pour aborder n'importe quel texte informatif.    
- La principale difficulté rencontrée par mes élèves est la rédaction de la phrase correcte qui reprend l'idée principale en y insérant les différentes informations. Je reprends alors une phrase d'un élève au tableau et nous la retravaillons ensemble en attirant l'attention sur le fait que souvent on commence par des compléments de P. qui indiquent le temps et le lieu. Ex. : "Au moyen âge, dans les belles salles des châteaux, les seigneurs et châtelains découvrent le plaisir des contes qui appartiennent aux traditions populaires. (...)
C'est ainsi l'occasion de revoir la construction des P., les différents compléments, les expansions du nom, la ponctuation...
 
Remarque :

  Si certains étaient intéressés par ma séquence sur le "conte", ils peuvent me contacter sur jean.luc.leonard@swing.be , sur jlleonard53@versateladsl.be ou sur leoussia53@yahoo.fr

(Et pour certains contes : les schémas narratifs et actanciels + le merveilleux et ses caractéristiques ainsi que  les notions (théorie) sur les schémas)

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